Aller au contenu

Page:Ibsen - Un ennemi du peuple, trad. Prozor, 1905.djvu/38

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

tiques. Personnellement, il a tenu à bien accentuer son indépendance à l’égard de tous les partis, surtout du parti radical de son pays. En de sanglantes satires, il montre l’œuvre de ce dernier construite sur les mêmes compromissions, sur les mêmes équivoques, sur les mêmes convoitises individuelles que les autres, et n’en différant que par plus d’hypocrisie et de tortuosité. Dans ses pièces, les êtres libres et autonomes qui représentent ce principe supérieur d’indépendance qu’il définit par la formule « être soi-même » ne sont jamais des personnages politiques. Dissolvante à l’égard du monde tel qu’il est, leur action s’exerce non point sur un champ particulier, mais sur le terrain universel où s’érigent toutes les institutions de ce monde, qu’elles soient politiques, religieuses, économiques ou familiales.

C’est à cette catégorie d’hommes qu’appartient, tout d’abord à son insu, Thomas Stockman, frère du maire Pierre Stockman, dont il vient d’être question. Une circonstance imprévue le révèle à lui-même. Ce médecin, ce savant, a doté sa ville natale d’un établissement thermal qui fait la prospérité de la cité et sur lequel se basent toutes les espérances et toutes les spéculations de ses habitants. Or, un jour, l’analyse lui livre un résultat déconcertant. La source même d’où découle l’eau des bains contient, il est vrai, tous les principes qui la rendent salutaire, mais les conduites que la municipalité a fait construire sont contaminées. Des milliers de microbes amènent la pestilence là où il s’agissait d’accumuler la santé. La cupidité des hommes dirigeants a vicié tout le carac-