Page:Ibsen - Une maison de poupée, trad. Albert Savine, 1906.djvu/89

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Nora.

Dis-moi, Anne-Marie… Je me suis toujours demandé quelque chose. Comment as-tu eu le courage de confier ton enfant à des mains étrangères ?

Anne-Marie.

Et que faire, puisqu’il me fallait élever la petite Nora !

Nora.

Oui, mais comment as-tu pu te décider ?

Anne-Marie.

Il se présentait pour moi une si bonne place. C’était une chance rare pour une fille qui avait eu un malheur… car le gredin ne voulait rien faire pour moi.

Nora.

Ta fille t’aura oubliée sans doute.

Anne-Marie.

Ah ! non, bien sûr, elle m’a écrit quand elle a fait sa première communion, et puis une autre fois, quand elle s’est mariée.

Nora, lui jetant les bras autour du cou.

Ma vieille nounou, tu as été une bonne mère pour moi, quand j’étais petite.

Anne-Marie.

La pauvre petite Nora n’avait d’autre mère que moi.

Nora.

Et si mes enfants venaient à n’en plus avoir, je sais bien que tu… Tout cela est parler pour ne rien dire. (Elle ouvre la boîte.) Allons ! va les retrouver, il faut que… Tu verras comme je serai jolie demain.

Anne-Marie.

Dans tout le bal, il n’y aura personne d’aussi joli que madame. Voilà mon avis.

Elle sort par la porte à gauche.