Page:Ibsen - Une maison de poupée, trad. Albert Savine, 1906.djvu/91

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Madame Linde.

Ah ! ah ! tu vas donner une vraie représentation ?

Nora.

Oui, c’est le désir de Torvald. Voici le costume. Torvald me l’a fait faire là-bas, mais il est si abîmé que je ne sais vraiment pas…

Madame Linde.

Il sera vite arrangé. La garniture seule est décousue par endroit. Dépêchons. Du fil ! des aiguilles ! Ah ! voilà tout ce qu’il faut ?

Nora.

Que tu es bonne !

Madame Linde, causant.

De sorte que tu te déguises demain. Écoute, je viendrai un moment te voir, moi aussi. Je ne t’ai pas remerciée pour la bonne soirée d’hier.

Nora, se levant, et traversant la scène.

Il me semble qu’hier on n’était pas bien ici comme d’habitude. Tu aurais dû arriver un peu plus tôt, Christine. Il est vrai que Torvald a au plus haut point l’art de rendre la maison agréable.

Madame Linde.

Et toi aussi… Ne nie pas. Tu es bien la fille de ton père. Mais, dis-moi, le docteur Rank est-il toujours aussi affaissé qu’hier ?

Nora.

Non, hier, il l’était plus que d’habitude. Le malheureux souffre d’une terrible affection de la moelle épinière. Vois-tu, son père était un être répugnant ! Il entretenait des maîtresses et… on pourrait même dire pis. Aussi son fils a-t-il été maladif depuis son enfance.

Madame Linde, laissant tomber son travail.

Mais qui t’a conté de pareilles choses, ma chère Nora ?