Aller au contenu

Page:Ingres d’après une correspondance inédite, éd. d’Agen, 1909.djvu/105

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 93 —

terminer le grand tableau et l’apporter moi-même à Paris, au prochain Salon. J’aurai encore un tableau de Vénus naissante, commencé depuis bien longtemps, pour parer aux dépenses et frais de mon voyage. Le Salon n’est probablement qu’au mois d août. Serait-il même en avril, que je m’arrangerais toujours pour arriver avec la grande page, vers le milieu du Salon. Adonc, cher ami, ou tu viendras alors à Paris, ou moi j’irai à Montauban. Tous ceux qui me veulent du bien m’engagent à aller à Paris avec mes ouvrages. Il est bien différent pour mes intérêts d’y être, que de n’y être pas.

Cette idée de revoir mon pays et surtout de t’y revoir, mon brave et digne ami, le seul que je puisse véritablement croire de ce nom, me met hors de moi, de plaisir et d’espoir. Peut-être notre réunion sera pour toujours. J’ai besoin de toi, pour être heureux. N’y aurait-il que de pouvoir parler à qui vous entend bien et à qui on peut si bien communiquer ses sensations, moi, qui ne vis que par elles ! Je n’ignore pas toutes les difficultés que j’ai à surmonter, celles de la fortune surtout et des moyens de me refaire une nouvelle case. J’irai sonder le terrain. Ma femme, si bonne et si raisonnable, restera à Florence pour diminuer la dépense, et je verrai ce que je dois espérer. J’ai encore à Paris d’assez bonnes connaissances qui m’ont toujours engagé à y revenir ; de même que tous mes camarades d’art, qui, je t’assure, me rendent pleine justice et ne cessent