Page:Ingres d’après une correspondance inédite, éd. d’Agen, 1909.djvu/210

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Bourgeois ; mais il faut du temps, pour se faire un nom. Le mérite, d’ailleurs, n’est pas tout, non, il n’est pas même la moitié. Il y a les préférences, les injustices criantes, les manifestes intéressés, les jalousies, l’indifférence ; il faudrait faire du Raphaël et encore plus. Il faut donc qu’il frappe et refrappe, s’il veut absolument réussir. Ne me demande même pas si on doil ainsi user la vie, quand on n’a qu’une existence. Pour moi, si j’étais à sa place, je me retirerais des hommes et je me passerais d’une gloire que je suis condamné à poursuivre par état, au milieu d’un vrai champ de bataille de méchants.

Le siècle est de fer, et celui qui te parle ainsi a cependant des succès. Tout ceci est confidentiel ; n’en fais, près de notre ami, que l’usage convenable, Je serais désolé de lui causer, (et surtout en matière d’amour-propre), le moindre chagrin. Mais voilà ce que je pense, et dans son véritable intérêt.

Mon bien cher, nous recevons, à l’instant même, un souvenir truffé, de ta part. Nous « montalbanaiserons » à ta santé et à ta bonne amitié. Je continuerai celle-ci très prochainement et ne te dis qu’un petit adieu. J’ai tant de choses à te conter !


À Monsieur, Monsieur Gilibert, Avocat, rue du Faubourg-de-Moustier, Montauban (Départ. Tarn-et-Garonne). Timbre de la Poste : 15 octobre 1828.

Mon cher et bien bon ami, j’ai bien partagé le malheur de ta situation ; tu le croiras bien, malgré le retard que