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rens [1], dont les Ingriana reposent trop silencieusement à la Bibliothèque de Carpentras, sa ville natale, qui a bien voulu nous les communiquer. Et nous compléterons les deux extraits : Ingres chez ses élèves et Ingres chez ses contemporains, par un troisième Ingres chez lui, dont les notes puisées aux cahiers du maître, conservés par le Musée de Montauban, nous laisseront l’attrait de leur emprunter de plus larges extraits encore, dans les chapitres qui nous restent à écrire.

II
Ingres chez ses élèves

— Le sculpteur Duret, ayant terminé son charmant Danseur Napolitain, sollicita la visite d’Ingres. Celui-ci, tout d’abord et d’un ton confidentiel, adressa plus d’un éloge, se réservant sur certains détails d’accessoires. Évidemment, il ne voulait compter qu’avec la question d’art le plus élevé, là où tout le monde voudrait surtout

  1. Jules Laurens, né à Carpentras, était entré en 1842 à l’atelier de Paul Delaroche, d’où sortaient à peine Gérôme, Hébert, Hamon et d’autres camarades, admirateurs quand même d’Ingres, que celui-ci fréquenta particulièrement, au retour d’un long voyage en Perse. Observateur plein de pénétration, il a écrit au jour le jour, sur ses contemporains, des notes quelquefois sévères et toujours originales, jusqu’au style même, qui révèle tout l’homme. Un jour qu’il se promenait avec un de ses élèves devant les vitrines de l’éditeur Dentu, au Palais-Royal, il lui confia timidement sa plus suprême ambition : « Avoir aussi mon petit livre à un tout petit coin de cette devanture ! » L’auteur de la Légende des Ateliers n’a pas vu, de son vivant, se réaliser son rêve. Le livre que ses admirateurs ont publié, après sa mort, ne s’en porte pas plus mal. Modestement édité à Carpentras, berceau de ce peintre écrivain, il lui reste à être plus connu pour rendre à son auteur les justes honneurs qu’il mérite.