Page:Ingres d’après une correspondance inédite, éd. d’Agen, 1909.djvu/349

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gardé ; et il le trouve chez Prosper Debia, le petit peintre amateur montalbanais dont un tableau, entr’autres, — les Nymphes, en cours d’exécution, — a recommandé au maître ce talent bien « poussinesque » qu’en paysage Jugres préfère à tout autre. « Je ne saurais te dire assez, écrit-il à Gilibert, combien je lui suis attaché pour son caractère, son talent et tout ce que son amitié pour moi m’a généreusement prêté d’obligeant, d’une manière si dévouée et sans borne. Car j’ai été bien heureux de l’avoir ici dans mon accouchement homérique, où il s’est dévoué à m’aider et à faire, avec un rare soin, ce que je n’aurais peut-être pu faire moi-même. » Dans les lettres que l’ingénu collaborateur écrit à ses parents de Montauban, nous lisons des passages comme celui-ci : « Le tableau d’Homère avance, les principales choses sont faites et n’ont besoin que de quelques retouches, mais il manque encore beaucoup de détails indispensables. Je vais, dans l’instant, me mettre à l’œuvre pour faire la rame de l’Odyssée, belle et simple figure, qu’une draperie verte enveloppe presque entièrement. » On aimera à suivre les impressions que ce correspondant sincère communique à Gilibert et aux siens, à mesure que l’Apothéose d’Homère se peint, devant lequel Prosper Debia négligera ses simples tableaux qu’il destine au Salon et qu’Ingres prendra finalement sous le bras pour leur faire franchir la passe redoutable. Il le lui devait bien. Voici, au hasard de l’inventaire, quelques-unes de ces lettres.

À M. Gilibert, a Montauban.
Paris, 2 octobre 1827.

Enfin, me voilà un peu libre, mon cher Gilibert, et, mes tableaux étant remis (au jury du Salon), je peux respirer un peu, voir et penser à mon aise, et m’entretenir un moment avec vous.

Debia (son frère) vous aura dit que j’avais vu Ingres