Page:Ingres d’après une correspondance inédite, éd. d’Agen, 1909.djvu/68

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m’entendre directement avec le Préfet pour cette affaire. Je lui écris en même temps qu’à toi. Fais-moi le plaisir de le voir et lui exprimer encore, par ta voix d’ami, la joie où je suis et le vif désir que j’ai de faire honneur à la patrie, à mes chers compatriotes et je te prie aussi bien de l’engager à me faire parvenir le plus tôt possible, (vu que je suis extrêmement pressé par le temps), le sujet du tableau, sa juste mesure, le lieu qu’il doit occuper et, aussi bien, comment il sera éclairé. Et même, fais-moi le plaisir de foire toi-même un petit croquis, dans ta lettre, de la chapelle. Si tu ne pouvais le faire toi-même, l’ami Gentillon pourrait très bien le faire. Il me ferait, en cela, un bien grand plaisir, à charge de revanche, payable sitôt reçu, en même monnaie.

Il est bien vrai que rien ne me fait plus de plaisir que cette circonstance qui me met en rapport si touchant avec le pays qui m’a vu naître, et je t’en remercie de tout mon cœur. J’espère aussi que mes compatriotes en ressentent quelque plaisir, malgré ce que tu me dis de leur peu d’inclination pour les arts. Je me flatte, peut-être, mais j’ai la conscience de croire que ma peinture pourrait leur faire quelque sensation ; ce dont ils devraient, je dois l’espérer, me tenir un peu compte pour remédier à la très modique somme de trois mille francs que le Ministre a allouée à cet ouvrage.

Tu vois, mon ami, que toujours, ils affectent, là-bas, de me traiter comme un jeune artiste qui s’essaie dans la carrière : et tout cela parce que ce