Page:Irving - Le Livre d’esquisses, traduction Lefebvre, 1862.djvu/244

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recueillis dans un excellent ouvrage en lettres gothiques intitulé : le Solliciteur d’amour auprès de Cupidon, lequel contenait nombre d’excellents avis à l’usage des célibataires, et qu’il promit de me prêter. La première strophe était ainsi conçue :


Vous désirez une veuve gentille ?
Ne dites pas : Voulez-vous, voulez-vous ?
Faites vos foins tant que le soleil brille,
Et bravement : Quand nous accouplons-nous ?


Cette chanson inspira le vieux gentleman à tête épaisse, qui fit plusieurs tentatives pour raconter une assez longue histoire tirée de Joe Miller, laquelle ne manquait pas d’à-propos ; mais toujours il s’arrêtait court au beau milieu, et tout le monde se souvenait du reste excepté lui-même. Le ministre aussi commençait à ressentir les effets de la bonne chère ; il s’était graduellement laissé aller à s’assoupir, et sa perruque inclinait d’une façon assez suspecte ; quand nous fûmes, probablement à l’instigation secrète de mon hôte, dont l’humeur joviale semblait toujours tempérée par son amour pour le décorum, invités à passer dans le salon.

La table enlevée, on abandonna la grand’salle aux membres jeunes de la famille, qui, excités à toute sorte de bruyante gaieté par l’étudiant d’Oxford et maître Simon, firent retentir ses vieilles murailles de leur entrain pendant qu’ils se livraient à leurs joyeuses gambades. Je me complais à assister aux ébats des enfants, surtout à cette heureuse et joyeuse époque ; aussi ne pus-je résister à l’envie de m’esquiver du salon sur un de leurs immenses éclats de rire. Je les trouvai jouant au colin-maillard. Maître Simon, le grand ordonnateur de leurs jeux, qui semblait en toute occasion remplir les fonctions de cet ancien potentat, le roi du tapage[1], était au milieu de la salle, les yeux bandés.

  1. À Noël il y avait dans la maison du roi, en quelque lieu qu’il demeurât, un roi du tapage ou maître des joyeux passe-temps ; la même chose existait dans la maison de tous les gentilshommes de grand lignage ou de haute dignité, que ce fût au spirituel ou au temporel. — Stow.