Page:Irving - Le Livre d’esquisses, traduction Lefebvre, 1862.djvu/265

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Il est deux événements annuels qui produisent beaucoup de sensation et de mouvement dans la Petite-Bretagne ; ce sont la foire de la Saint-Barthélémy et le jour de l’installation du lord-maire. Pendant le temps de la foire, qui se tient dans les régions attenantes de Smithfield, on n’y fait plus partout que commérer et courir çà et là. Les rues naguère tranquilles de la Petite-Bretagne sont envahies par une multitude de personnages à figures étranges ; chaque taverne est un théâtre de tapage et de bombance. Le matin, à midi et le soir, s’échappe des salons de cabarets le bruit des violons et des chansons, et l’on peut voir à chaque fenêtre quelque groupe de joyeux compères, les yeux à demi clos, le chapeau sur le côté, la pipe à la bouche et le grand pot à la main, qu’ils caressent en prononçant des discours sans fin et en fredonnant des refrains bachiques au-dessus de leur liquide. Il n’est pas jusqu’au grave décorum des familles particulières, lequel, je dois le dire, est en d’autres temps rigidement observé parmi mes voisins, qui soit à l’épreuve de ces saturnales. Pour ce qui est de songer à retenir les servantes à la maison, folie. Leurs cervelles sont absolument retournées par Polichinelle et les marionnettes, les chevaux de bois, signor Polito, le mangeur de feu, le célèbre M. Paap et le géant irlandais. Quant aux enfants, ils dépensent en prodigues tout l’argent de leurs menus plaisirs à acheter des jouets et du pain d’épice doré, et remplissent la maison du tapage.