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Page:Isaac Newton - Principes mathématiques de la philosophie naturelle, tome1.djvu/47

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SUR LA PHYSIQUE DE NEWTON[1]


À MADAME


LA MARQUISE DU CHASTELET.


TU m’appelles à toi, vaſte & puiſſant génie,
Minerve de la France, immortelle Emilie.
Je m’éveille à ta voix, je marche à ta clarté,
Sur les pas des vertus & de la vérité.
Je quitte Melpoméne & les jeux du Théâtre,
Ces combats, ces lauriers, dont je fus idolâtre.
De ces triomphes vains mon cœur n’eſt plus touché.
Que le jaloux Rufus, à la terre attaché,
Traîne au bord du tombeau la fureur inſenſée
D’enfermer dans un vers une fauſſe penſée ;
Qu’il arme contre moi ſes languiſſantes mains,
Des traits qu’il deſtinoit au reſte des humains ;
Que quatre fois par mois un ignorant Zoïle
Eléve en frémiſſant une voix imbécille ;
Je n’entends point leurs cris que la haine a formés.
Je ne vois point leurs pas dans la fange imprimés.
Le charme tout-puiſſant de la Philoſophie,
Eléve un eſprit ſage au-deſſus de l’envie.
Tranquille au haut des cieux, que Newton s’eſt ſoumis,
Il ignore en effet s’il a des ennemis.
Je ne les connois plus. Déja de la carriére
L’auguſte vérité vient m’ouvrir la barriére ;

  1. Cette Lettre eſt imprimée au-devant des Elémens de Newton, donnés au Public par M. de Voltaire en 1738 & 1742.