Page:Ista - Contes & nouvelles, tome II, 1917.djvu/52

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
50

revoir, attendez que je vous écrive. Je vous l’affirme, je ferai quelque chose de vous.

Il répéta ces mots plusieurs fois, en la poussant doucement dehors. Elle s’en fut, ravie.

L’auteur sonna son domestique, et lui dit :

— Vous reconnaîtrez cette dame ?

— Oui, monsieur.

— Chaque fois qu’elle reviendra, vous lui direz que je viens d’avoir une attaque d’apoplexie.

— Bien, monsieur.

Resté seul, Claude Soleret se remit à sa table de travail, devant la page interrompue par l’arrivée de Nichette. C’était une grande feuille portant ce titre :

AU PIED DU LIT,
vaudeville en trois ou quatre actes.
PERSONNAGES.

Sous le titre, il y avait des noms d’hommes et de femmes, suivis de brèves indications de caractère, raturées, couvertes de surcharges. La dernière ligne contenait ces mots :

« La petite grue du second acte. Caractère… »

Il n’y avait rien, plus rien, après le mot « caractère ».

L’auteur empoigna sa plume, d’un grand geste joyeux, et se remit à écrire :

« Bête, bête, bête ! Vaniteuse, bavarde, volubile et gaffeuse. Chacune de ses bêtises, de ses gaffes, de ses insanités, est précédée de cette petite annonce : « Je vous dis ça pour me faire apprécier. »

Il avait l’air ravi d’un homme qui vient de faire une bonne trouvaille, et il murmura, en se frottant les mains :

— C’est la providence des vaudevillistes qui l’a envoyée poser chez moi, cette enfant… Fichtre oui, mademoiselle, je ferai quelque chose de vous ; mais pas comme vous l’entendez…