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lèvre rouge que fendait un pli voluptueux. Gaston respira longuement, trop bouleversé encore pour penser nettement à autre chose qu’à la douceur de cet air frais qui entrait en lui, calmant la fièvre de son âme et le frisson de sa chair.

Le silence dura. Mme  Cocheroy réfléchissait. Gaston respirait. Puis il sentit son impolitesse, fit un grand effort de pensée, et murmura :

— Vous avez là un bien joli peignoir.

Aussitôt, elle se remit à sourire, et entra dans de longues et confuses explications sur les avantages de ce vêtement : C’était agréable et commode, on n’avait besoin de presque rien porter dessous ; ça ne tenait que par trois agrafes, dont elle indiquait la place d’un doigt discret : Une, deux, trois, c’est ouvert !… Sa main fouillait les dentelles, tiraillait les rubans, avec des gestes brusques et nerveux. Puis elle s’allongea, comme si elle était lasse, sa tête penchée vers l’épaule du jeune homme, qu’elle touchait presque. Dans ce mouvement, la large manche du peignoir glissa, agrandissant encore l’échancrure du décolletage. Mme  Cocheroy ne s’était aperçue de rien. Elle se taisait de nouveau, et ses yeux fixaient sur un angle du plafond des regards si étranges, que Gaston regarda aussi de ce côté. Il n’y avait rien, c’était un angle de plafond comme un autre, avec des moulures peintes et dorées. Furtifs et vascillants, les yeux de l’amoureux revinrent vers le peignoir. Il avait glissé encore, découvrant toute l’épaule, toute une moitié de la gorge blanche et mouvante que l’attitude penchée de Mme  Cocheroy présentait en enfilade aux regards de Gaston.

Et cette femme continuait à ne se douter de rien ! Elle ignorait que la manche de son peignoir eût glissé,