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Page:Ista - Contes & nouvelles, tome III, 1917.djvu/33

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Lorsqu’elle entra au foyer, à l’heure des avances, une clameur l’accueillit :

— T’es fraîche, ma petite !… T’en as, une santé, de filer sans rien dire !… T’as quinze francs d’amende et une engueulade à la clef, mon enfant !

Ahurie, Zulma ouvrit une bouche en cul de poule.

— Et ben, et vous autres ? demanda-t-elle.

— Mais nous avons dansé, nous autres. Ficelle est venu nous rechercher au Café des Artistes. Et puis, c’est pas vrai, c’ qu’on avait dit ; Chonchette n’a jamais parlé de nous au patron…

Et une longue explication, incompréhensible mais péremptoire, et jacassé par cinq ou six langues à la fois, démontra que Chonchette était un ange, que Théréson en était un autre, et que ces deux modèles de circonspection étaient absolument incapables de dire du mal de qui que ce fût.

— Avec tout ça, t’es dedans pour quinze balles, insista Ficelle.

Zulma eut un magnifique haussement d’épaules. « M’en fous ! » répondit-elle dédaigneusement. Ce fut si bien envoyé, qu’il y eut un murmure général d’approbation. Ça fait toujours plaisir de voir des gens qui sont au-dessus de ces petites misères. Et tout de suite, elle les fit crever de rire, cette sacrée Zulma, en imitant la gueule de Ficelle quand il en est à sa cinquième mominette.

Son tour venu, elle entra dans le cabinet du secrétaire. Celui-ci consulta un registre, se gratta l’oreille droite, puis la fesse gauche, et, sans rien dire un mot, secoua négativement la tête.

— Et ben ! et mes vingt balles ? s’exclama la danseuse.

— T’as quinze francs d’amende, expliqua l’employé. Il t’en restait trente-cinq à toucher. Trente-cinq moins