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par un beau dimanche

et Hougnot entendit, très distinctement cette fois, le bruit d’une demi-douzaine de longs baisers qui chantaient haut et clair. À chaque baiser, le chétif coquelicot s’inclinait violemment, poussé par une fougueuse crispation de la belle bottine jaune.

À ce moment, dans les profondeurs du souterrain, la voix lointaine du docteur héla :

— Walthère !… Où donc êtes-vous ?

Au lieu de répondre à celui qui l’appelait, là-bas derrière, Hougnot cria vers le ciel, d’une voix furibonde :

— Marie !… Joséphine !… Que faites-vous là ? Aussitôt, la bottine jaune disparut, rapide comme un oiseau qui s’envole, et plus un bruit, plus un souffle ne descendit du soupirail béant. Le docteur arrivait, la bougie haute, piaffant comme un petit cheval fougueux sous la voûte sonore, et faisant un bruit de tous les diables.

— Où sont mes filles ? beugla Hougnot.

— Là-haut, dans la chapelle.

— Avec qui ?

— Avec personne, que je sache.

Hougnot regarda d’un air soupçonneux M. Brusy, qui regarda sa bougie d’un air béat.

— Allons les rejoindre sur-le-champ !… Je veux les voir ! dit enfin le père.

— Elles vous réclament également, riposta l’oncle. Mais où donc êtes-vous venu vous perdre ? C’est le chemin des oubliettes, par ici, et il y a du danger à aller plus loin.

À ces mots, Hougnot fut saisi d’une telle frayeur rétrospective, qu’il dut se cramponner à la paroi pour ne pas tomber. Le docteur marchait le premier et ne s’aperçut de rien. L’autre se traînait derrière lui, livide, et si tremblant qu’il se demandait s’il pourrait jamais arriver jusqu’à la chapelle. Il y parvint pourtant, vit ses filles bien sagement assises sur le gazon, toutes