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Comme le dernier coup d’onze heures sonnait, le mammouth posa sa palette en disant :

— Ma œuvre elle est finie, et ça est encore oune chef de œuvre !

Sa femme plus expéditive que lui, avait déjà terminé depuis dix minutes, Un quart d’heure plus tard, Zouzoune se retrouvait dans la rue, serrant en sa menotte un billet de dix francs, généreusement octroyé par Archibald pour une heure de pose. Contente, au fond, de n’avoir pas débuté avec un gorille, humiliée, pourtant, de s’être déshabillée devant un mâle sans qu’il en fût rien résulté, elle grommelait, énervée et hargneuse :

— C’est un peu fort, tout de même, que j’arrive pas à m’en débarrasser !… Faudra-t-il que ce soit moi qui en viole un, pour qu’on se décide à me la prendre, ma vertu !


vi


Sophie et Zouzoune sont bien tranquilles, bien heureuses. Pour injures et coups à un infâme sergent de ville, qui prétendait l’empêcher de continuer à boire à crédit sans l’autorisation d’un ignoble mastroquet, Casimir Bourbeux est nourri et logé, pendant quinze jours, non plus aux dépens de Sophie, mais à ceux de l’administration pénitentiaire.

Comme Zouzoune a retrouvé de l’ouvrage dans un atelier de couture, les deux femmes, avec leurs salaires réunis, se paient de petites douceurs inaccoutumées. Aussi la gosse affirme-t-elle :

— Maman, c’est bien plus chic la vie, quand ton homme n’est pas là.

À quoi Sophie répond, philosophe :

— Pour des choses qu’y a, bien sûr !… Mais j’me réjouis tout d’même rudement qu’y soye lâché, mon salaud d’ conjoint… Dans la vie, vois-tu, faut toujours qu’y ait un truc qui vous démange… Quand c’est pas les puces, c’est l’estomac… Quand c’est pas l’estomac, c’est autre chose. Et j’ te garantis qu’y m’ démange bien fort, mon p’tit autre chose, depuis, huit jours que Casimir a plus couché ici… Tu voiras ça, fifille, quand t’auras tâté d’ la bagatelle !