Page:Istrati - Kyra Kyralina.djvu/123

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sentiments qui font du mal à d’autres et à nous-mêmes ?…

Restés seuls, mon premier mouvement, aussitôt les bougies allumées, fut de regarder dans les yeux de Kyra ; je la trouvai aussi fanatique dans son désir de meurtre. Elle s’en faisait une fête. Elle était dans l’extase. Elle s’habilla en décolleté et se maquilla, comme pour recevoir des moussafirs, et elle ne cessait pas une minute de chantonner. Sur sa pommette gauche, elle portait une tumeur violette, grosse comme une noix :

« Embrasse ça fort ! » me dit-elle, « Ce soir, le feu de l’arquebuse l’effacera !…

— Kyra », dis-je, en embrassant la blessure, « n’aimerais-tu pas mieux appeler nos oncles et partir avec eux ?…

— Non ! » cria-t-elle ; « d’abord il faut punir le meurtrier de notre mère !… Ensuite, nous partirons.

— Mais ça doit être effroyable à voir !

— Ça doit être beau ! » hurla-t-elle, ouvrant les bras et m’embrassant.

Les minutes s’écoulèrent, lentes, terrifiantes, comme dans un cauchemar. Je caressais l’espoir que le père et le frère ne viendraient ni ce soir, ni les suivants, et que les oncles, lassés, abandonneraient