Page:Istrati - Kyra Kyralina.djvu/220

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C’est ici le point culminant de mon calvaire… Ici trouvent leur fin les tristesses de plus de trois années d’enfance tourmentée… Car, si Dieu fut cruel avec moi et me refusa Kyra, il y eut tout de même une Providence. Cette Providence m’envoya un ami.

Ramassant mon corps meurtri, j’eus à peine la force de me traîner de l’autre côté du chemin, je me jetai à terre, épuisé. À ce moment, un homme entre quarante et cinquante ans, pauvrement habillé en costume grec, et portant, dans une main, son récipient à salep, dans l’autre, le panier avec les tasses, s’approcha de moi, posa ses outils et, croisant les bras, arracha une exclamation du fond de ses entrailles :

« Ah, mon pauvre garçon ! » fit-il en grec, « J’ai été témoin de ta flagellation, j’y ai assisté impuissant ! Quelle offense as-tu commise à ces païens pour te faire maltraiter de la sorte ? »

Je regardai sa figure imprégnée de sincérité, sa barbe chiffonnée et grisonnante, ses yeux bons et endoloris sous un front tout plissé ; et pris de rage, je lui criai, révolté contre mes propres sentiments :