Aller au contenu

Page:Itinéraire de Cl Rutilius Numatianus, poème sur son retour à Rome, trad Despois, 1843.djvu/49

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

à rien qu’ils ne s’y attachent comme de la glu, qui rendent Argus borgne et Lyncée aveugle ; car, sous les yeux des gardiens du trésor, le vol des deniers publics se fait avec la plus grande dextérité. Mais ces brigandages n’échappèrent point à Lucillus, et une seule main résista à tant de mains avides, aux cent mains de ces nouveau Briarées.

Déjà, revenu de Pise à Triturrita, je livrais au souffle heureux du Notus ma voile pendante, quand tout à coup le ciel se couvre de sombres nuages ; des éclairs jaillissent et déchirent la nue : nous nous arrêtons ; car qui oserait, par un temps orageux, se confier à la mer en démence ? Nous occupons le loisir que la mer nous impose à parcourir les forêts voisines, et nous nous livrons à l’exercice de la chasse. Le paysan, qui nous reçoit, nous fournit les instruments nécessaires, avec des chiens dont l’odorat subtil fait découvrir le gîte. Bientôt vient se prendre dans nos pièges et dans les larges mailles de nos filets un sanglier aux dents terribles comme la foudre ; un sanglier que n’eût osé attaquer le bras de Méléagre, et qui eût échappé aux étreintes puissantes du fils d’Amphitryon. Alors la trompette fait retentir l’écho des collines, et les chasseurs, qui rapportent la proie, la rendent plus légère par leurs chansons. Cependant l’Africus aux ailes humides ne cesse pendant plusieurs jours de voiler le ciel sous de sombres nuages. Déjà, au point du jour, le coucher des Ilyades était accompagné de pluies violentes, qui nous cachaient aussi le Lièvre, étoile peu brillante, mais puissante à soulever les flots, et sous laquelle nul navire n’ose quitter la terre inondée de pluie : car elle est voisine de l’orageux Orion, et fuit, humide proie, devant le Chien brûlant. Nous vîmes les flots jaunis par le sable agité et la mer vomissant ses ondes inonder les campagnes. Ainsi l’Océan se répand au milieu des plaines, quand il couvre de ses flots vagabonds