Page:Ivoi - Jud Allan, roi des gamins.djvu/191

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propre lit, avec la satisfaction d’un mortel assuré de pouvoir prendre trois heures de repos, avant de procéder à une tournée d’inspection nouvelle. Quelle eût été sa surprise, s’il avait pénétré un peu plus tard dans la chambre du malade !

Jud s’était levé sans bruit. À tâtons il s’habillait. Parfois, un mouvement du bras blessé lui arrachait un soupir d’angoisse, mais le gamin n’en continuait pas moins ses préparatifs.

Un quart d’heure avant minuit, le prisonnier se trouva prêt.

Il quitta la salle, sortit sans encombre de l’infirmerie et parvint dans la cour inférieure.

Son bras pesait lourdement à son épaule, ses tempes battaient avec force, sous la poussée de la fièvre croissante. Il n’en avait cure. Il fallait marcher, il marcherait.

Une crainte vivait en lui, décuplant ses forces, exacerbant sa volonté.

Celle de manquer les bandits Tom et Jetty, en face desquels il allait se trouver pour la première fois.

À pas furtifs, se maintenant dans l’ombre protectrice des bâtiments, il arriva près du tuyau d’écoulement dont le tube l’avait mis dans la confidence des projets de ses « associés d’évasion », ainsi qu’il les nommait déjà.

La grande horloge du pénitencier sonna douze coups, s’envolant au loin sur la campagne endormie en vibrations semblables à des battements d’ailes.

Minuit !

Une émotion intense étreignit le gamin. S’il avait mal compris ? Si les misérables avaient changé d’idée, modifié leurs plans ? L’agitation de la fièvre le portait aux doutes, aux imaginations pénibles.

Mais cette anxiété dura peu de minutes.

Une corde se déroule en raclant le mur. Son extrémité vient fouetter le bras blessé du petit guetteur, lui causant une douleur aiguë.

Sa bouche s’ouvrit pour un cri, mais, par un énergique effort de volonté, ce petiot de douze ans parvint à refouler l’exclamation prête à jaillir.

Et puis, la corde se balance de façon rythmique.

Évidemment, l’un des hommes a commencé sa descente.

C’est vrai, Jud n’y a pas songé. Ils ne doivent descendre que l’un après l’autre.

Qu’arrivera-t-il, si le premier aperçoit le gamin ?