Page:Ivoi - Jud Allan, roi des gamins.djvu/242

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perdus que fussent les bandits, la désinvolture de leur chef leur causait un malaise. Ils devinaient que l’affaire annoncée était tout simplement une trahison contre les États-Unis.

— Vous savez la situation du propriétaire de l’hacienda de Agua Frida. La propriété, à titre de colonisation, lui a été reconnue totale, c’est-à-dire que, de même que les anciens chefs féodaux d’Europe, qui commandaient les marches ou frontières des États, les Pariset sont tenus, en cas de conflit du Mexique avec une autre puissance, de coopérer à la défense du sol ; mais en temps de paix, sous la seule condition qu’ils acquittent l’impôt voté par les assemblées de Mexico, le gouvernement mexicain s’est interdit de s’immiscer dans le mode d’exploitation, travaux, aménagements, etc., des terres placées sous la dépendance des maîtres de Agua Frida. En réalité, les Pariset, détenteurs d’un territoire plus étendu que celui de la Belgique, peuvent donc agir, sous la condition de l’impôt, comme de véritables souverains indépendants…, que dis-je, bien plus librement que des souverains, car ils ont la liberté de simples citoyens, lesquels ne sont tenus à aucune consultation ou approbation des cours étrangères. Eh bien, j’ai négocié l’affaire, mes braves garçons. Deux choses étaient à éviter :

1° Que le gouvernement Japonais parût dans la transaction ;

2° Que j’y parusse moi-même, ce qui aurait, à un moment donné, mis à découvert notre association.

Une société civile japonaise, derrière laquelle se voile le gouvernement, s’est constituée. Elle signera une location à bail de Agua Frida pour une durée de quatre-vingt-dix-neuf années, au prix à forfait de trois cents millions.

— Trois cents millions, répétèrent les bandits, oubliant tout à l’énoncé de ce chiffre prestigieux !

— Oui, mes dignes amis, trois cents, lesquels seront versés en dix échéances, durant l’année qui suivra la signature du bail, et qui, quoi qu’il arrive par la suite, demeureront acquis au vendeur.

— Admirable, clama Kan-So enthousiasmé ! Admirable en vérité.

Frey l’invita au calme d’un geste de la main.

— Ladite société japonaise créera un port, fortifiera la côte, comme elle l’entendra. Cela nous est indifférent, n’est-ce pas ? Occupons-nous des trois cents millions, beaucoup plus intéressants pour nous.