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L’AÉROPLANE-FANTÔME

— Soyez tranquille. J’ai appris que la franchise ne mène à rien, et je veux venger celle qui n’est plus. Vous m’avez fait plaisir, herr Von Karch, fit-elle avec une caresse dans l’accent. Je le mérite d’ailleurs, car moi aussi, j’ai songé à vous être agréable.

Il tendit la main vers des papiers qu’elle lui présentait.

— Ce sont des photographies ?

— Des plans et épreuves que l’Ingénieur…

— De François de l’Étoile ? Murmura Margarèthe.

Liesel affirma de la tête.

— Mais comment avez-vous pu ?

— En prendre des clichés ? Bien aisément, allez. Tout le jour, il est à l’usine de Billancourt. Il m’est facile de pénétrer dans sa chambre de la pension de famille Villeneuve, puisque je suis interprète de la maison.

L’Allemand avait déroulé les épreuves. Il les considérait avec attention. Il eut un geste violent.

— Toujours la même chose, grommela-t-il ; des parties séparées de l’appareil ; et aucune indication d’assemblage.

Comme les jeunes femmes le considéraient d’un air interrogateur, il s’expliqua :

— Depuis que tu es entrée à la pension de famille, Liesel, j’ai transmis à Berlin, toutes les photographies que tu m’as remises. On a réalisé toutes les pièces détachées, à Eissen, aux ateliers d’aérostation militaire… Nos ingénieurs se sont étonnés de l’originalité des dispositifs imaginés par ce satané François, seulement ils ont cherché vainement à assembler les divers fragments révélés par le dessin. Tous reconnaissent sans peine, que les organes reproduits appartiennent à un appareil unique. Ils sont unanimes aussi à déclarer qu’aucun ne comprend ce qu’est cet appareil.

— En vérité, s’exclamèrent ses interlocutrices, stupéfiées par l’étrange affirmation.

— Oui, c’est ainsi. L’Ingénieur garde le nœud de son secret. Très fort, ce garçon. Il a pensé sans doute que l’on pourrait fouiller dans ses cartons, et il a pris ses précautions en conséquence. Il livre aux indiscrets le corps de son invention, mais l’âme, si je puis m’exprimer ainsi, il la conserve pour lui seul.

— En ce cas, j’ai fait de la besogne inutile.

L’inquiétude sonnait dans ces paroles de Liesel. Von Karch la rassura aussitôt.

— Non, non, ma fille. Tu as fait de ton mieux et tu seras récompensée…