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Page:Ivoi - L’Aéroplane fantôme.djvu/404

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LE LIT DE DIAMANTS.

Les sons, déformés par mille échos, ne sont plus reconnaissables. Ils se confondent en un accord sinistre, grondement lugubre de ce royaume des ténèbres.

Mordant sur le lit du rio, un cube de granit adossé à la paroi du Cenote, dresse à dix mètres au-dessus du niveau liquide, une plate-forme sensiblement horizontale.

Par quel phénomène ce bloc a-t-il échappe à l’érosion qui, au cours des siècles, a assuré la formation de l’abîme ? Ceci fait partie des mystères géologiques auxquels les savants s’évertuent vainement à trouver une explication.

Ce que l’on peut dire, c’est que l’homme s’est servi de ce piédestal créé par la nature.

Le sentier escaladant la pente, part de la plate-forme.

Mais du tunnel où disparaît le fleuve souterrain, sort une rumeur sourde. Elle s’enfle, grossit ; on discerne des voix rudes, des clappements d’avirons sur l’eau. Puis une lueur tremblotante apparaît, se précise ; elle est produite par une lanterne attachée à la proue d’un grand canot.

— Nous sommes arrivés, clame la voix juvénile de Tril. Voyez la marque sur le rocher ; la pointe se dirige vers la surface du sol.

— C’est bien, débarquons, riposte Von Karch, secoué par une fureur chronique depuis qu’Édith lui a été enlevée.

La jeune Anglaise disparue, l’espion a été pris d’épouvante. Sur ses ordres affolés, les rameurs ont « nagé » de toute la puissance de leurs bras.

Dans le couloir souterrain qui amène le rio à la mer, Von Karch a paru se ressaisir.

Le courant est faible, régulier. On le remonte sans trop de peine, stoppant chaque fois qu’une galerie latérale se présente afin de reconnaître le conduit indiqué par le Croc reproduit sur le plan venant de Brumsen.

Parfois, dans les premières heures du voyage, on entend des voix féminines devisant dans le doux idiome Maya, harmonieux et sonore comme la plus exquise musique.

Ceci indique que l’on va passer en vue de lavoirs souterrains, ou d’aiguades fréquentées.

Alors on rame avec prudence. Il ne faut pas attirer l’attention des habitants sur des voyageurs suivant une voie que personne ne suppose pouvoir être empruntée.

En de certains endroits, il est nécessaire de stopper, d’attendre que les bavardes aient repris le chemin de la surface, car sans cela, il serait impossible de se dissimuler.