influences exigeant de nous une mésalliance aussi horrible : la fille des Rochegaule unie à un banquier. Vous qui êtes brave, vous qui êtes vaillant, vous nous donneriez du courage. Venez. Lucile pleure. Venez. Chaque jour je vous attendrai à la Croix des Cosaques pour vous conduire au château et vous y introduire à l’insu du comte. »
Cette missive bouleversa Marc et, par ricochet, Espérat. Celui-ci, en rentrant au quai Malaquais, fit part de l’aventure à Bobèche.
Le pitre l’écouta pensif :
— Tu as lu ce poulet, mon vieil Espérat ?
— Oui, et avec attention, je t’assure, puisque je le sais par cœur.
— Il y est bien dit que tous les monarques…
— … Tiennent à ce mariage ? Oui, certes… c’est là ce que je ne comprends pas.
— Moi non plus. Seulement une chose est claire.
— Tu vois quelque chose de clair là dedans ?
— Parbleu ! Si l’hymen en question réjouit les alliés, c’est qu’il doit peiner l’Empereur.
— Tu crois ?
— J’en donnerais la tête de mon directeur à couper.
— Alors, à ton avis ?
— Le capitaine ferait sagement de tout confier à Napoléon.
Le gamin protesta :
— Lui, qui est déjà si préoccupé… l’entretenir d’une pareille misère.
Mais le pitre lui pinça l’oreille :
— Mon petit, en politique, il n’y a pas d’incident négligeable. Tout ce qui met l’ennemi en joie est dangereux. Sois persuadé que l’Empereur, qui est beaucoup plus malin que moi, partagera cette appréciation.
Milhuitcent n’était pas difficile à convaincre. L’Empereur lui apparaissait chaque jour davantage comme un dieu. Il résoudrait sans effort le problème incompréhensible pour Marc, pour lui-même.
Aussi le lendemain de bonne heure, le fils adoptif de M. Tercelin se présentait aux Tuileries, gagnait la chambre du capitaine, trouvait ce dernier prêt à sortir et lui racontait sa conversation avec Bobèche.
— Il a raison, fit Marc sans hésiter. Mais pourrai-je joindre l’Empereur.
— Oh ! vous, s’écria le gamin avec confiance…
— Vous ne savez pas ce qui se passe ?
— Non… quoi donc ?