père, le sort de la campagne sera décidé, la France sera débarrassée des envahisseurs. Cependant soyez plus énergique. Affirmez que j’aimerais mieux perdre Paris qu’accepter le démembrement de la France, que je préférerais même abandonner mon trône aux Bourbons, à des conditions honorables pour le pays[1].
— Oh ! quel dommage que la France entière ne puisse vous entendre, Dupeutit, murmura le diplomate dont les yeux s’étaient voilés de larmes !
Le courrier approuva d’un signe de tête, puis continua :
— Voyez Metternich.
— Metternich ?
— Ministre de mon beau-père, François d’Autriche.
— Lui ? fit encore le diplomate.
— Dites-lui ceci, poursuivit Dupeutit sans s’arrêter à l’interruption :
l’armée autrichienne de Schwarzenberg marche trop vite…
M. de Caulaincourt parut surpris :
— Trop vite ?… Mais depuis Montereau, elle a battu en retraite, devant les troupes de Sa Majesté…
Il se tut. Imperturbable, le courrier récitait toujours son message :
— Trop vite… On croirait que S. M. François a hâte d’arracher le sceptre à sa fille bien-aimée Marie-Louise.
Dupeutit respira, et pour conclure, murmura :
— C’est tout.
— Tout ?
— Non pourtant. Sa Majesté a insisté sur l’urgence de la communication à M. de Metternich.
Sans répondre, le duc de Vicence sonna, et à son valet de chambre Costard, qui parut aussitôt :
— Mon chapeau, mon épée, mon manteau.
— Monsieur le duc sort. Ferai-je atteler ?
— Non. Donne-moi seulement ce que je demande.
Puis tandis que Costard s’empressait d’obéir :
— À tout à l’heure, Dupeutit, attendez-moi. Si vous avez besoin de nourriture, de repos… usez de ma maison comme si elle était vôtre.
Il était prêt.
Après un signe de tête amical au courrier, M. de Caulaincourt sortit de son logis et se dirigea vers la demeure de M. de Metternich.
- ↑ Paroles textuelles. Mémoires de Caulaincourt.