— Les chefs ? demanda l’un de ceux-ci.
— En reconnaissance, répondit-on.
— Loin ?
— Non.
— Bah ! en tous cas, nous allons interroger ces messieurs. Ce sera autant de fait.
Et s’adressant aux prisonniers, celui qui venait de prononcer ces paroles, reprit :
— Je vous le répète, vous n’avez rien à craindre. Seulement il faut parler clair et franc. Qui êtes-vous ?
Les captifs se consultèrent du regard, puis chacun à son tour :
— Je suis Antoine, dit Bobèche, comédien.
— Moi, j’ai nom Espérat.
— Et moi, Henry.
— D’où venez-vous ?
— De Châtillon-sur-Seine.
Un murmure satisfait s’éleva, mais un geste du questionneur l’apaisa aussitôt.
— C’est au mieux, dit-il, alors vous êtes en mesure de nous donner de précieux renseignements.
— À une condition toutefois, déclara Milhuitcent… Vous nous connaissez à présent ;… nous ne vous connaissons pas. Qui êtes-vous à votre tour ?
— Le jeune coq chante haut, plaisanta son interlocuteur ; mais nous n’avons pas à nous cacher. Partisans, combattants volontaires, nous formons l’arrière-garde de l’armée française qui, hier, a écrasé à Saint-Dizier un corps prussien occupant la ville.
Espérât s’inclina :
— Alors je répondrai avec plaisir, car nous aussi servons l’Empereur.
— Vous venez de Châtillon, disiez-vous, poursuivit le partisan sans s’arrêter à la remarque du jeune homme ?
— Cela est vrai.
— Quelle route avez-vous suivie ?
— Nous avons coupé par Montigny, La Ferté, Lignot, Soulaines et Montiérender.
— Et vous marchez depuis… ?
— Trois jours.
— Trois. Vous alliez lentement.
— Nos chevaux étaient fatigués lorsque nous quittâmes Châtillon.