— Bilmsen… je le sais. La pauvre enfant n’a pas eu le courage de laisser fusiller mon pauvre Marc Vidal… Je ne saurais lui en vouloir… j’ai été heureux de retrouver cet ami fidèle.
— Il est auprès de vous, Sire ?
— Oui.
— Alors vous n’ignorez plus rien.
Henry hasarda timidement :
— Votre Majesté a perdu un dévoué soldat à Châtillon.
— Lequel ? interrogea Napoléon dont le visage s’assombrit encore.
— Le comte de Rochegaule, mort pour le service de l’Empereur. Celui-ci demeura un instant muet, et avec une émotion profonde.
— C’était un brave… un vrai gentilhomme.
Puis mélancoliquement :
— Ce nom à présent sera porté par un ennemi, ce vicomte d’Artin…
— Non, s’exclama Henry, non, Sire, et c’est là ce que je désirais vous apprendre. Avant de rendre l’âme, le comte a désigné l’héritier du titre. Il a choisi le plus digne, et vous ratifierez la décision du défunt.
— Le plus digne… ?
— Espérat Milhuitcent, enlevé tout enfant à la tendresse de son père, miraculeusement retrouvé.
Les traits de l’Empereur se détendirent.
— Toi, murmura-t-il, toi, petit.
Mais redevenant grave :
— Comte Espérat de Rochegaule, je suis heureux de vous féliciter… heureux d’être assuré qu’un nom que j’aime sera noblement porté.
— Sire, balbutia le jeune garçon.
— Ce nom, va, sonnera comme une fanfare de gloire dans les appartements des Tuileries. De même que tous, tu as cru la partie perdue. Tu as pensé : Les amis de l’Empereur n’ont plus qu’à lui offrir leur existence… allons mourir autour de lui… Oui, tu baisses la tête, tu t’es dit cela. Eh bien ! reprends courage. Les soldats de France sont toujours invincibles et je suis à leur tête. Il m’est doux d’avoir à mes côtés des amis comme toi, mais c’est à la victoire que je les conduirai. Sous les murs de Paris, Napoléon veut vaincre, Napoléon vaincra.
Et s’apaisant soudain :
— Bobèche, Espérat, Henry, vous ferez partie de mon escorte. Allez trouver Marc Vidal qui a repris son service auprès de moi ;… qu’il vous installe. Allez… j’ai encore beaucoup à travailler avant de dormir.
Les visiteurs s’inclinèrent et se retirèrent pour se mettre en quête de