sur la rive gauche de la Seine entre Essonnes et Paris, le second dans Paris même, le dernier sur la rive droite du fleuve.
Il projetait de fondre sur le groupe de la rive gauche, de le refouler dans la capitale, où les habitants, ranimés par ce coup d’audace, engageraient aussitôt la guerre meurtrière des rues.
Pour lui, passant alors la Seine, sur tous les ponts dont il disposait, il attaquerait les corps concentrés sur la rive droite, se placerait sur la ligne de retraite des armées d’invasion, les mettant ainsi dans une situation dont il leur serait impossible de se tirer.
En vingt-quatre heures, la face des choses aurait changé. La France serait sauvée, elle reprendrait sa frontière du Rhin.
— Va, mon enfant, va, fit l’Empereur avec bonté. Tu vois dans l’avenir… Va… qu’ont-ils encore trouvé, mes ennemis de Paris ?
— Sire, ils ont nommé, le 1er avril, hier, un gouvernement provisoire.
— Dont fait partie M. de Talleyrand sans doute ?
— Oui, Sire, et avec lui, MM. de Dalberg, Bournonville, de Jaucourt, l’abbé de Montesquiou. Sous le titre de commissaires délégués, on a placé le baron Louis à la tête du ministère des finances ;…
— Bon choix. Louis est un économiste distingué.
— Le général Dupont à la guerre.
— Moins bien cela ; Dupont est un piètre officier.
Napoléon raillait ses adversaires, Espérat reprit gaiement :
— On a tenté d’amener la garde nationale à substituer la cocarde blanche à la cocarde tricolore, mais Allent, chef de l’état-major, a opposé une telle résistance que les royalistes ont dû renoncer à leur projet.
— Je me souviendrai d’Allent.
— Dans la journée, M. de Vitrolles est arrivé à Paris, annonçant la venue prochaine du comte d’Artois, frère de Louis XVIII, actuellement encore à Hartwell, près Londres.
— Louis XVIII est plus prudent que son frère. Il me sait à Fontainebleau sans doute et ne se risque pas à rentrer en France.
— Enfin Milhuitcent prit un ton méprisant : — M. de Caulaincourt a eu aujourd’hui même une entrevue avec le czar Alexandre. Il voulait savoir quel sort on vous réservait au cas où vous consentiriez à abdiquer… Il a demandé pour vous en apanage, la Toscane, ou Parme, ou Lucques. Le souverain lui a répondu : nous ne voulons plus de Napoléon dans l’Europe continentale… Je lui ferai offrir la Corse. — La Corse est à la France, répliqua Caulaincourt et Sa Majesté ne l’accepterait pas.