— Le maître, lui, ne veut pas qu’on les tue.
— Pourquoi ?
— Je ne sais pas… Seulement puisqu’il défend, il ne faut pas.
— Et alors ?…
— Alors, je me mets en route. Le maître m’a donné un de ses fameux boutons feux de bengale, tu sais…
— Oui. — Tandis que San couronnera de rouge le « Fiancé de la Nuit », moi j’enflammerai le sommet du Fils du Jour…
— De l’autre côté de la passe de Ki-Lua ?
— Précisément, un feu jaune.
— Jaune ?
— Couleur produite par un mélange de chlorate de potasse, d’oxalate de soude et de gomme laque.
— Oh ! s’écria Sourire avec admiration, tu sais donc tout ?
— C’est le Maître qui m’a appris cela.
Le gamin s’était levé.
— Tu pars ? demanda-t-elle.
— Ma foi, pour être cette nuit là-bas…
— Et moi, que ferai-je ?
— Tu suivras les autres de la troupe. Je suis parti à la chasse, n’importe où… On n’aura pas de défiance, puisque tu seras là, avec les panthères.
— Oh ! San nous surveille… tu sais, depuis que tu as envoyé Zizi au Maître… On s’est étonné de sa longue absence ; nous avons eu beau pleurer, avoir l’air de croire la pauvre bête perdue, ils ont conservé des doutes.
— Raison de plus pour être très prudents.
Mais Sourire ne semblait pas persuadée. Sur sa figure maigre, dans ses yeux noirs, il y avait comme un voile d’indécision.
Un instant, elle ouvrit la bouche ; on eût cru qu’elle allait parler.
Mais elle se ravisa, eut un mouvement mutin de la tête, puis tendant ses mains menues à son jeune compagnon.
— Va donc, mon cher Tzé ; après tout, cette fois, tu ne cours pas d’aussi terribles dangers que le jour où tu t’es jeté dans le torrent des cavernes des Taï-Pings.
— Oh ! fit-il, une simple promenade.