— Que me voulez-vous ? clame le Japonais repoussant les curieux qui le séparent de l’employé.
Ce dernier salue et, tendant le papier qu’il tient délicatement entre le pouce et l’index :
— Une lettre, signor général. Elle a été déposée sur le bureau de l’hôtel.
— Par qui ?
— Cela je l’ignore. On n’a vu personne.
Rageusement, le Japonais, exaspéré par ce nouveau mystère, déchira l’enveloppe et lut à haute voix cette étrange missive :
« Illustrissime guerrier, honorabilissime signor.
« La fleur de votre foyer est parmi nous. Les fleurs, vous le savez, s’étiolent vite, lorsque les jardiniers négligents ne les arrosent point. Soucieux de son éclat, nous vous convions à l’arrosage.
« Il vous sera facile. Vous portez sur vous un carnet de chèques, auxquels votre signature donne une valeur illimitée.
« Conservez-le dans votre poche, et ce soir même, frétez une voiture. Faites-vous conduire sur la route du Nord, jusqu’à la colonne Pompéïana. Là, nous causerons de l’adorable signorina, la bellissima.
« Notre salut balaie la terre devant vous, illustre guerrier.
« P.-S. — Évitez de mêler la police à tout cela. Notre modestie nous interdit de nous présenter à des gens policiers, et la fleur périrait de notre défaut d’entente.
« Signé : les 3 S…[1] »
— La Camorra ! C’est la Camorra, bégayèrent les assistants de voix tremblantes, qui en disaient long sur le respect qu’inspire la terrible association.
- ↑ Les 3 S correspondent aux trois mots stileto, scopietta, strada, synthétiques de l’état des bandits : Stylet escopette, fuite.