Page:Ivoi - Le Message du Mikado.djvu/14

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Un seul présent lui avait été agréable : un théâtre avec une troupe de poupées à habiller.

Durant des mois, ses instants de loisir avaient été consacrés à munir ces pantins d’une garde-robe complète.

Chapeaux, jupes, pourpoints, corsages, il taillait d’instinct, cousait sans avoir appris, et les relations de son tuteur s’étaient extasiées devant son adresse, son goût. Il se souvenait d’un vieux général en retraite, grommelant :

— Ce garçon est né couturière et modiste.

Et tout bas, désolé, le jeune homme murmura :

— J’étais déjà fille de chambre.

La réflexion ne lui rendit pas le sourire. Elle constatait irrémédiablement son impuissance à la lutte virile pour l’existence.

De fait, il comprenait qu’en présence des révélations d’Alcide, il était incapable de prendre une décision.

Rejeter la personnalité d’emprunt de Véronique, ce serait se jeter dans les mains de la police, car il n’aurait ni la ruse, ni l’énergie nécessaires pour dépister les recherches.

Quitter le Mirific. À cette seule idée, il frissonnait. Jamais il ne se sentirait le courage d’aller affirmer ailleurs sa fausse identité.

Alors quoi ? Rester là. Il était admis par tous en qualité de Véronique Hardy ; mais, d’un instant à l’autre, la supercherie pourrait être découverte.

Plus il allait, plus son indécision croissait. Comme tous les faibles, il s’abandonna au hasard. Il décida de ne rien décider.

Minuit sonna.

Un inspecteur effectua la ronde prescrite au tableau de service pour cette heure.

En passant devant la pseudo-fille de chambre, il échangea avec elle les répliques usuelles :

— Rien à signaler ?

— Non, rien.

— Quels numéros sont encore dehors ?

— 103 à 106, 157 et 158, 192.

— C’est tout ?