Page:Ivoi - Le Radium qui tue.djvu/143

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Est-ce qu’elle allait être obligée de rentrer à New-York, d’interrompre sa cure de repos, de ce fait que ses serviteurs avaient l’infamie de ne pas vouloir être poignardés pour elle ?

Des heures coulèrent en tergiversations.

Vers trois heures, Mérédith vint frapper à la porte de la chambre, ce qui fit sauter en l’air la veuve, alors blottie dans un fauteuil.

— Qui est là ? clama celle-ci… Si vous entrez, je fais feu, vous êtes mort…

Comme arme à feu, elle brandissait un simple gratte-dos dont elle s’était emparée machinalement. La voix de la camériste l’apaisa :

— C’est moi, mistress, votre fidèle Mérédith. Je ne puis pas entrer du reste, car vous avez poussé le verrou.

— Qu’est-ce que vous voulez, fille sans cœur ?

— Dire à Mistress que l’on apporte une lettre de Mrs. Lodgers.

— Une lettre, glissez-la sous la porte.

Il y eut un silence. L’organe de la femme de chambre s’éleva de nouveau.

— C’est que la personne doit vous la remettre en mains propres. C’est l’ordre qui lui a été donné par Mrs. Lodgers. Alors elle refuse de se dessaisir de la lettre, et Mistress voudra bien reconnaître que je ne saurais la faire passer sous la porte.

— Sotte bête ! gronda la veuve. Évidemment, une personne ne peut entrer par là. Comment est cette personne ?

— Une jeune dame comme moi.

— Comme vous ? Alors c’est une servante et pas une dame.

— Mistress a raison.

— J’ouvre. Vous entrerez avec l’envoyée de Mrs. Lodgers.

Le verrou cliqueta, le battant tourna sur ses gonds, et Mérédith parut précédant la jeune personne de noir vêtue, dont la présence au Parc Central n’avait inquiété ni Hermann, ni l’homme à la barbe fauve disparu plus tard dans les dépendances du consulat d’Autriche-Hongrie.

Cette dernière s’avança modestement et tendit à la veuve la lettre écrite la veille par Mrs. Lodgers.

La châtelaine de Stone-Hill la lut avec attention, coupant sa lecture de petites exclamations ; enfin