Page:Ivoi - Le Radium qui tue.djvu/155

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modestement dans le boudoir où l’attendaient Mrs. Tolham et son hôte.

Lucy, debout derrière sa maîtresse, eut peine à retenir une exclamation.

Mathiesel montrait sa main droite enveloppée de bandes de toile.

Elle s’était donc blessée depuis tout à l’heure ?… Sans doute la veuve se fit une réflexion identique, car désignant la main bandée :

— Qu’est-ce que c’est que ça ? fit-elle.

— Oh ! un petit accident, répliqua l’intéressée. En me frisant, la lampe à alcool s’est renversée, j’ai éteint et me suis brûlée… Ce ne sera rien, j’ai mis de suite un cataplasme de fécule pour empêcher la brûlure de creuser, mais ceci n’a aucune importance. Mistress m’a appelée, je suis à ses ordres.

Sur un signe de la veuve, Lucy, à son grand regret, dut quitter la pièce. Il lui eût été doux d’assister à l’entrevue de l’héroïne et du non moins héroïque et roux docteur Meulen.

D’un coup d’œil rapide, Mathiesel avait enveloppé le docteur. Sans hésitation, elle avait reconnu le personnage avec lequel l’agent Hermann s’était naguère rencontré dans le Parc Central de New-York.

Mais elle avait aussitôt baissé les yeux, et dans une pose modeste, attendait que Mrs. Tolham parlât.

Celle-ci, du reste, ne mit point sa patience à une longue épreuve.

Elle expliqua la gentillesse de ce cher docteur Meulen qui, ayant appris l’état de siège dans lequel on vivait à Stone-Hill, était accouru aussitôt pour offrir son bras à la pauvre veuve effrayée. Il ne voulait pas qu’une minute de plus, l’Amérique assistât à cette honte : une jeune fille préposée à la garde d’un manteau pouvant la conduire au trépas.

— Une véritable sortie de bal de Nessus, appuya le docteur avec l’air satisfait d’un lettré lançant une citation sensationnelle. 

Bref, le docteur, cet ami dévoué, allait passer la journée à Stone-Hill. Il retournerait à New-York le lendemain matin, mais reviendrait le soir. Évidemment, le fou ne risquerait une tentative que la nuit. Eh bien, c’est lui, docteur, qui chaque nuit aurait la garde du manteau. Ainsi cette pauvre jeune Mathiesel n’aurait plus rien à redouter, cela vaudrait mieux pour tout le monde.