Page:Ivoi - Le Radium qui tue.djvu/182

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— Le diable rôtisse Thémis en ce cas ! gronde sourdement le malade.

— Bon ! bon ! Ils n’appartiennent pas à la même mythologie, master Jeffries. Il est donc peu probable qu’ils se rencontrent pour procéder à l’opération de cuisson dont vous parlez. Au surplus, cela m’est indifférent et à vous aussi, je gage. Vous préférerez sans doute que je vous apprenne pourquoi je redouble ma visite.

— Je préférerai cela ou autre chose, pourvu que ce ne soit pas long.

— Et pour aller vite, je supprime toutes les circonlocutions inutiles, continue M. Thomson. En deux mots, voici l’affaire : je dois, tout le monde connaît les formalités d’une enquête judiciaire… je dois fournir un rapport sur mes constatations d’hier.

— Vous ne souhaitez pas que je l’écrive pour vous, plaisante celui que je crois être un forçat.

— Non, non, master Jeffries, ceci serait de l’indiscrétion… Or, l’indiscrétion et moi n’avons jamais passé par la même porte. Dans mon rapport, je dois donner une foule de détails, notamment des renseignements circonstanciés sur la personne de ceux que j’ai interrogés, renseignements d’ordre moral d’abord, et aussi d’ordre physique.

— Ah ! ah !

— Votre personne morale, vos papiers me l’ont fait connaître.

— Ils vous ont dit tout ce que je sais sur mon compte, interrompit l’interpellé. Si vous désirez d’autres détails, il faudra vous adresser ailleurs.

— Non. Vos papiers m’ont suffisamment éclairé.

— Alors, si vous êtes éclairé, qu’est-ce que vous voulez de plus ?

— Me renseigner sur votre personne physique.

— Ah ! bon… En bien ! vous le voyez, je suis malade.

Le juge souligna la phrase d’un rire paterne. Sa lenteur m’exaspérait. Je ne me rendais pas compte que, vu la loi américaine qui protège l’individu infiniment plus que les lois européennes, M. Thomson était tenu aux plus grands ménagements à l’égard d’un personnage dont l’identité, indiquée par moi, n’était point suffisamment prouvée par mon témoignage unique.

— Oh ! malade, reprit aimablement le magistrat,