Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/241

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— Qu’elle y entrait ?

— Oui.

Fleck l’embrassa tendrement :

— Tu es une fille intelligente, tu observes. Je suis sûr que la présence de ces dames t’a conduite à…

— Un souvenir de certaine lettre, acheva vivement Lisbeth.

L’homme d’affaires se frotta les mains avec la plus parfaite jubilation :

— Je disais bien. Tu es intelligente et réfléchie. Ah ! Herr Niclauss, en vous la donnant pour compagne, je ne sais si je ne vous donne pas un trésor supérieur à l’autre.

Puis, revenant à sa fille :

— Eh bien, oui, ma Lisbeth, je pense, comme toi, que nous venons de voir passer la fräulein Daalia, dont nous avons ignoré l’existence jusqu’à notre arrivée à Djokjokarta.

Et, ravi, triomphant par avance :

— Elle ne se doute pas que ses manœuvres sont percées à jour. Allons souper.

Sur cette conclusion, tous trois descendirent sous une véranda peinte en bleu et blanc, agrémentée de légers lattis qui servaient de support à des plantes grimpantes.

C’était un nid de feuillages et de fleurs, d’où l’on apercevait la place dont le soleil couchant rougissait les ombres de tons de rubis sombre.

Décor de féerie, cuisine cosmopolite. Fleck et Niclauss s’abandonnaient voluptueusement aux charmes de la soirée.

Des bouffées de fumée odorante leur arrivaient, sur l’aile de la brise du soir, fumées produites par les baguettes de santal enflammées des porte-feu suivant quelque seigneur ou quelque riche colon.

Des tympanons résonnaient sourdement dans la cité indigène, des harpes à deux cordes, pincées par d’invisibles musiciennes, lançaient leur plainte douce, dans le murmure confus des choses.

Elles disaient l’adieu aux ardeurs du jour, le salut à la fraîcheur bienfaisante de la nuit proche. La vie, suspendue durant les heures torrides, se remettait en marche. C’était un crépuscule ayant des allures d’aube.

Et Lisbeth songeait toujours, grignotant distraite-