Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/123

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cela. Mes agents muets, la piste perdue… oui, oui… Elle se défie.

Sullivan marchait avec agitation en prononçant ces phrases incohérentes ; mais revenant tout à coup à Bell, qui attendait sans un mouvement que son maître eut achevé son monologue :

— Lui as-tu conseillé, à ce niais de Massiliague, de prévenir la jeune fille ?

— Oui… seulement j’ai dû être très prudent

— Qu’a-t-il répondu ?

— Rien.

By Hell ! (pour l’enfer), alors notre opération n’aura aucun résultat.

— J’en demande pardon à Monsieur, je pense, au contraire, qu’elle en aura… qu’elle aura même celui que désire Monsieur.

— Tu penses que Massiliague va essayer de rejoindre la Pacheco ?

— Oui… et que nous le filerons, comme l’a résolu Monsieur, et que nous trouverons par lui la cachette de la Sudiste, et que nous les enverrons tous dans un monde meilleur où ils ne conspireront plus contre la grandeur des États-Unis.

Tout en parlant, Bell se rapprochait de l’une des fenêtres.

— Si Monsieur le permet, j’estime que Monsieur a bien fait de louer cette maison inhabitée, dont les croisées donnent de ce côté sur le logis Coldjam. À travers les volets fermés, il est facile de surveiller la demeure de notre homme. Que Monsieur me croie ; il y aura du nouveau avant peu. Le personnage a des yeux qui bavardent quand sa bouche se tait. Je jurerais que j’y ai lu son désir de filer vers le Llano Estacado.

Sans doute, Joë avait été à même d’apprécier la perspicacité de son domestique, car il parut rassuré :

— Que le bon génie des États-Unis t’entende, Bell. Car seul le Français peut renouer la piste. À dater de ce moment, l’un de nous sera sans cesse en observation ici.

— Aux ordres de Monsieur. Si même Monsieur n’y voit pas d’empêchement, je veillerai la nuit. Monsieur se réserverait la faction de jour, et il pourrait se reposer en se fiant à la vigilance de son fidèle Bel.

— Convenu, mon garçon, convenu. Sois tranquille,