Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/210

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lèvent la tête, tendent le cou vers la plaine… Vous savez bien que ces signes annoncent toujours l’approche des Indiens… les animaux les sentent de loin, comme les fauves.

— Cela est vrai.

— Depuis une heure, j’observe cela. Que maintenant les pauvres bêtes se mettent à frissonner, à pousser des hennissements plaintifs, et nous pourrons dire, sans crainte de nous tromper : La plaine n’est plus déserte. Les Peaux-rouges nous guettent.

Il achevait à peine qu’un cheval hennit douloureusement.

Les Canadiens sursautèrent :

— Tu as entendu ? murmura Gairon.

— Oui, chef. Sans surprise d’ailleurs, je m’y attendais.

Un second hennissement passa dans l’air, plaintif, exprimant l’épouvante.

Aussitôt un remue-ménage se produisit dans le camp.

Fabian Rosales, accoutumé, comme tous les hacendados de la frontière, aux soudaines attaques des Indiens pillards, s’était élancé au milieu des Mayos.

— Entravez les chevaux. Leur terreur indique le voisinage de bravos (Indios bravos — non civilisés).

Ces paroles avaient retenti comme un coup de foudre. En un instant, les guerriers du Puma, le chef lui-même, avaient bondi vers le parc dès bêtes de somme et de selle. Ils mettaient les animaux dans l’impossibilité de s’enfuir.

Souvent, en effet, les montures d’une caravane, prises en pareil cas de terreur panique, s’élancent en un galop furieux, piétinent leurs maîtres, s’échappent et disparaissent, privant ainsi les voyageurs de leurs services, au moment où ils en ont le plus grand besoin.

À l’appel de l’hacendado, Dolorès, Cigale, les Canadiens, Coëllo avaient couru vers lui. Ils l’entouraient.

Les interrogations se croisaient.

— Des Peaux-rouges ?

— Des bravos, avez-vous dit ?

— Où sont-ils ?

— Qu’est-ce qui vous fait penser cela.

Ce fut Gairon qui répondit :

— Le señor Rosales est un cavalier de la frontière.