— Ah ! si c’était Massiliague !
— Nous le saurons à l’instant. Venez à la rencontre de Guerrero, señorita.
Elle ne répondit rien, mais elle rendit la main à son blanc coursier, et Fabian, ayant imité ce mouvement, tous deux se dirigèrent vers le messager.
Bientôt celui-ci, un vieillard basané, aux cheveux blancs, arrêta sa monture, un vigoureux mustang[1] à deux pas des promeneurs, et levant son chapeau bossué, déteint, s’écria :
— Señor padrone, des étrangers demandent la nourriture et une couche pour la nuit prochaine.
— Leurs noms ? fit vivement Dolorès.
— L’un est un señor français…
— Un Français ?
— Et dit s’appeler Chapultepec.
— Ah ! s’écria Dolorès avec un geste de douloureuse impatience, ce n’est pas encore lui.
Et la tête penchée, en proie à des réflexions pénibles, elle ne parut plus s’intéresser à l’entretien.
Cependant, tout en se mettant en marche vers l’hacienda, Rosales interrogeait le vaquero :
— Chapultepec est un nom mexicain, mon brave Guerrero ; tu as dû mal entendre.
— Non, non, señor, répliqua le vieillard. Le caballero m’a dit : Je te donne la traduction de mon nom.
— La traduction… Ce voyageur s’appellerait donc Cigale.
Puis avec insouciance.
— Au moins c’est là un vocable français.
Puis, se ravisant :
— Ne m’as-tu pas annoncé plusieurs voyageurs ?
— Si, señor.
— Quels sont les autres ?
— Deux chasseurs.
— Bon, bon.
Poussant son cheval auprès de celui de la Mestiza, l’hacendado l’éperonna pour accélérer son allure, tandis que Guerrero retenait le sien, afin de suivre son maître à distance respectueuse.
- ↑ Le cheval fut apporté en Amérique par les Espagnols. Il s’y multiplia considérablement et revint même à l’état sauvage. Les mustangs sont des chevaux sauvages, capturés au lasso, et dressés.