Page:Ivoi - Millionnaire malgré lui.djvu/115

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
105
L’HÉRITAGE DE LA « FRANÇAISE ».

de Presbourg ; de Chine, rue de Babylone ; de Corée et du Siam, avenue d’Eylau ; du Japon, avenue Marceau ; de Perse, place d’Iéna.

Partout il se présentait, prononçait un mot à voix basse, et aussitôt il était introduit avec une déférence presque épouvantée.

Le soir, il revint dîner à l’Hôtel ; une indiscrétion de domestique lui apprit que M. Topee et miss Laura passaient la soirée à l’Opéra-Comique, dans la loge de Nicols Craumell, le roi du pétrole.

Lui aussi se rendit à ce théâtre.

Mais sans doute la musique lui était indifférente, car il employa son temps à observer Laura. La jeune fille, ignorant ces yeux inquisiteurs fixés sur elle, bavardait, applaudissait, riait le plus naturellement du monde.

Ce qui provoqua cet aparté du Turkmène.

— Et pourtant elle est simple, naturelle…, et dans ses yeux bleus, il y a du cœur, mieux que cela, de l’intelligence du cœur.

Dix minutes avant la fin du spectacle, Dodekhan quitta la salle Favart. Une voiture le ramena à l’Hôtel Monumental, où il put gagner son appartement, sensiblement plus tôt que ceux dont l’état d’esprit l’inquiétait si fort.

Le microphone ne lui apporta que cet adieu rapide du père et de la fille.

— Bonsoir, père.

— Bonsoir, Laura. Toujours pas le plus petit prince ?

— Ne me parlez pas de cela, père ; ce sera le tourment de toute ma vie. Enfin, je n’ai pas de chance !

Pas de chance, cette jolie fille qui n’avait eu que la peine de naître pour posséder une fortune invraisemblable.

Dodekhan eut un ricanement amer. Ce pas de chance si mal appliqué lui avait rappelé le souvenir de son père, des Armaris, de la « Française », de tous ceux que la fatalité avait frappés autour de lui.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Vers huit heures du matin, on heurta à sa porte.

— Qu’est-ce ?

À l’interrogation lancée à voix haute un organe aigrelet répondit :

— Voyageur de Tours !

De Tours !… D’un bond, le jeune homme fut debout, se vêtit en un tour de main et courut ouvrir.

M. Kozets entra.

— Succès complet. Tous les renseignements… J’ai même vu le jeune homme, sans qu’il s’en doute.