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LES ASSOIFFES DE LUMIÈRE.


Singulier cas de folie double. Le mystère de Marseille.
Sont-ce des Nihilistes ? L’obscurité s’épaissit.


— Folie double ?

— Nihilistes ?

Ces exclamations jaillirent des lèvres des Anglais. Le romancier s’inclina légèrement, recommanda le silence du geste, puis reprenant sa lecture :

« Hier, — c’est-à-dire le 23 septembre dernier —, les agents Peyral et Barbon, faisant une tournée de service sur la promenade de la Corniche…

— À Marseille ?

— Oui… « Les agents Peyral et Barbon découvrirent deux jeunes femmes, élégamment vêtues, plongées dans un sommeil profond… Ils eurent beau les appeler, les secouer même, les dormeuses n’ouvrirent point les yeux.

— Ah bah ! s’exclama Miss Violet, dont les joues rosées, les regards brillants exprimaient l’intérêt.

— Attendez, attendez… Ceci n’est rien encore… Je poursuis : « Las de leurs vains efforts, les agents conclurent que le sommeil des inconnues n’était, point naturel. Sur ce, Barbon se détacha, réquisitionna des porteurs et des civières, et les mystérieuses belles au bois dormant, furent transportées au commissariat de police le plus proche. Là, il fallut plus de trois heures pour ramener les énigmatiques personnes à la conscience des choses, M. Bellugga, le sympathique commissaire, en avait conclu de suite que les dames subissaient l’étreinte d’un narcotique puissant.

— Oh ! un narcotique !

— On a l’impression d’un roman d’Anne Radcliffe !

— Tout cela n’est rien encore, fit Max en souriant. Écoutez la suite :

« Les étrangères revenues à elles, M. Bellugga les interrogea.

« L’une, adorable blonde, âgée de vingt printemps à peine, ne répondit que par ces phrases incohérentes : « La nuit est la complice… Vers la lumière… Là-bas… l’Orient… la clarté. »

« La seconde déclara être la duchesse de La Roche-Sonnaille, épouse du clubman parisien bien connu. Sa compagne, d’après elle, répondait au nom de Mona Labianov, et était fille du général qui eut l’honneur de représenter le gouvernement russe au dernier congrès de la Paix.

« Puis la jeune femme raconta une étrange histoire, si étrange que M. Bellugga n’hésita pas à aviser le parquet.

« Il s’agissait d’une immense conspiration asiatique dirigée contre l’Europe, de l’enlèvement de M. et Mme de la Roche-Sonnaille en plein voyage