Page:Ivoi - Miss Mousqueterr.djvu/491

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
468
MISS MOUSQUETERR.

fours. C’est à devenir fou, cette inexplicable disparition de deux cents guerriers, avertis que le Maître viendrait cette nuit même, amenant des captifs à supplicier.

Joyeux, lui, s’est avancé vers la baie ogivale, entrée du Réduit Central. Le géant n’a pas le temps de lui crier de prendre garde à la terrible clôture électrique dont il a subi autrefois les effets.

Le petit passe sans difficulté.

Quoi ? Le courant ne fonctionne plus ? Le Graveur de Prières se précipite… Il franchit le seuil et reste stupéfait, atterré. Le Réduit Central est vide de ses prisonniers.

Alors, une rage folle saisit le géant jaune. Il est trahi ! La trahison seule a pu dépeupler ainsi la métropole souterraine. Dodekhan est libre ! Le duc est libre ! Ah ! du moins, ils ne se réjouiront pas de leur victoire. Ils pleureront des larmes de sang. Ces femmes, leurs cœurs, il va en faire des mortes.

Il a arraché son revolver de sa ceinture ; il le braque sur Mona, mais la jeune fille étend le bras… De ses doigts fuselés semble rayonner une lumière violacée : Et San demeure comme figé… Ses mains se portent instinctivement à son front où s’est marqué un point rouge, telle une brûlure ; il a un cri sourd, puis il roule sur le sol avec un bruit mat de chair morte.

Et comme tous regardent, stupéfaits de ce dénouement inattendu, une voix dont ils frissonnent éperdûment résonne sous la voûte du temple.

— Mona, Mona, chère Mona, merci à vous qui avez délivré l’Asie.

Dodekhan, Lucien sont là.

Deux cris rauques, surhumains, déchirent l’air. Sara est dans les bras de son mari, Mona est soutenue par ceux de Dodekhan, et, durant quelques minutes, elles sanglotent répandant les larmes délicieuses de la tendresse enfin triomphante.

— Lucien !… Nous rentrerons vite en France, et adieu les voyages. Jamais plus je ne veux dépasser l’octroi de Paris.

— Ma douce Sara, ta volonté sera la mienne. Et Mona murmure, rougissante, le front appuyé sur l’épaule de Dodekhan :

— Maintenant, consentirez-vous à m’associer à votre existence ?

Il la regarde doucement. Dans ses yeux il y a une joie divine et une mélancolie indicible.

— Ma vie sera paisible, Mona. L’Asie n’a point encore l’esprit qui