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LES CINQ SOUS DE LAVARÈDE

dragon jaune brodé sur la poitrine, attendaient immobiles, le moment de « travailler ». Près d’eux, ou apercevait le banc sur lequel on étend le condamné à mort et les cages de bois destinées à recevoir les têtes criminelles. Plusieurs déjà contenaient leur proie, et de voir ces visages exsangues, grimaçant la mort à la foule, c’était lugubre.


Le ballon dirigeable.


Lavarède pâlit, mais l’orgueil gaulois lui fit aussitôt redresser la tête. Puisque la mort était inévitable, il fallait l’accueillir gaiement, comme une amie attendue et montrer aux fils de Han comment sait mourir un français. Sur l’ordre des toas de l’escorte, il s’assit sur le banc des suppliciés. Là, écrasé sous le poids de la cangue, les oreilles emplies de bourdonnements, il attendit que l’instant fatal eût sonné.

Tout à coup il tressaillit, ses regards devinrent fixes. La ligne de soldats venait de s’ouvrir et, dans l’espace réservé, miss Aurett avait paru, appuyée au bras de son père.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

La voile de la brouette gonflée par un vent favorable, les Anglais avaient quitté Takéou. L’esquif terrestre marchait bon train, et le coolie coréen trottait dans les brancards.

Le soir du premier jour, ils atteignirent Tien-Tzing où le résident anglais, sir Grewbis, voulut absolument les garder à dîner. Cet homme aimable était enchanté de passer une soirée avec des compatriotes, et lorsqu’il apprit leur projet de gagner Peking, sa joie devint du délire. Lui-même se rendait aux fêtes dont le lancement du ballon dirigeable était le prétexte. Il se ferait un plaisir de donner à ses hôtes une place dans sa voiture, bon véhicule construit en Europe et ne ressemblant en rien aux