— Soit, mais cela ne répond pas à ma question.
— C’est bien simple. J’ai la cabine numéro 10, dont le prix a été soldé par cet excellent M. Bouvreuil ; voyage en première classe et nourriture, tout est compris.
— Il a soldé… pour vous ?
— Non, pour lui.
— Aoh !… Je ne comprends pas.
— Eh bien, quoi ? Je suis dans sa cabine.
— Ah !… et lui ?
— Lui ? Il est dans ma caisse, parbleu !…
— La caisse est à bord ?
— Non pas… elle est restée à terre.
— Et lui dedans ?
— Certainement… lui dedans.
Sir Murlyton songea quelques secondes, puis sourit à sa fille qui, s’approchant, avait entendu les derniers mots.
— Pas du tout correct, dit-il avec gravité, mais fort ingénieux.
Puis il tourna les talons et alla s’accouder au bastingage. Les deux jeunes gens échangèrent quelques paroles :
— Vous avez réussi, Monsieur, je vous en félicite.
— Si j’ai franchi ce premier danger, miss, c’est à vous que je le dois, je ne l’oublie pas.
— Oh ! monsieur, nous ne sommes pas quittes encore.
— Vous tenez donc bien, fit-il en souriant, à me devoir la vie ?
— Je tiens surtout à ne pas nuire à vos intérêts.
— Même aux dépens des vôtres ?
Miss Aurett ne répondit pas et se rapprocha de son père. Il était naturel qu’Armand y suivit cette jeune fille si peu cupide ; sa nouvelle amie, d’ailleurs, l’y autorisa d’un regard. Leur groupe réuni, elle dit :
— Vous allez me trouver bien curieuse, monsieur Lavarède, mais lorsque, par hasard, — elle rougit vivement en prononçant ces mots, — lorsque, par hasard, la porte de votre petit appartement de voyage s’est ouverte, il y a une heure, il m’a semblé apercevoir comme un siège capitonné… Me suis-je trompée ?
— Pas du tout, Miss.
— Aoh ! comment et pourquoi capitonné ? demanda sir Murlyton.
— Parce que cela avait été préparé tout exprès pour faire un long voyage, des Pyrénées à Paris, par un fantaisiste dont j’avais raconté l’aven-