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Nous ne nous occuperons ici que de la partie profane de cette grande solennité des indigènes de l’Océanie, et principalement des préliminaires et des apprêts de ce grand festin.

Dès les premiers jours du mois de novembre, des pourparlers s’engagent entre les chefs de famille voisins de case (huiraatira). Le soir, assis par terre, les jambes croisées, ou étendus sur le ventre, les pieds en l’air, sur l’« aretu »[1] de la case, ou sur l’herbe qui s’étend en tapis vert devant la porte, aspirant la fumée de la cigarette de tabac que la maîtresse de céans a roulée dans un fragment de feuille de pandanus, hommes, femmes et même enfants échangent leurs idées sur la fête projetée pour célébrer le 1er janvier de l’année nouvelle, et font leurs observations sur la dernière fête correspondante. Chacun prend la parole quand il le peut, mais on écoute l’orateur dans un religieux silence.

Ces tournois oratoires ont lieu plus tard en plein vent, soit devant la porte de la case du « tavana » (chef du district), soit de celle du « péritilini » (président du conseil de la même circonscription), ou du « toohitu » (membre du tribunal supérieur indigène), ou de l’« irititure » (député de la chambre législative), ou de l’« aüvaa » (orateur officiel du canton), ou enfin de l’un des principaux « hui-raatira » (chefs de famille). Dans ces réunions officielles, les femmes et la jeunesse des deux sexes n’assistent qu’à titre de spectateurs avec voix ou plutôt cris approbatifs. Les orateurs sont généralement des personnages importants de l’endroit, revêtus d’une autorité officielle ou d’une grande considération personnelle.

On ne saurait s’y prendre trop longtemps d’avance pour discuter les nombreuses opinions en litige, et qui toutes ont, aux yeux des Tahitiens, une importance de premier ordre.

L’« amuramâa » sera-t-il général et collectif pour le district tout entier ? ou n’aura-t-il lieu qu’en famille, entre parents et amis ? Dans quel emplacement sera-t-il célébré ?

Quelles en seront les dispositions et l’ornementation ?

  1. Très-fine bruyère conservant longtemps sa souplesse et sa fraîcheur.