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Ministère de l’instruction publique, des beaux-arts et des cultes.




Le Président de la République française,

Sur le rapport du ministre de l’instruction publique, des beaux-arts et des cultes, du ministre des finances et du ministre de l'intérieur,

Vu la loi du 9 décembre 1905, concernant la séparation des Eglises et de l'Etat, notamment l'article 11 et l'article 43, paragraphe 1er, ainsi conçus :

« Art. 11. — Les ministres des cultes qui, lors de la promulgation de la présente loi, seront âgés de plus de soixante ans révolus et qui auront, pendant trente ans au moins, rempli des fonctions ecclésiastiques rémunérées par l'Etat, recevront une pension annuelle et viagère égale aux trois quarts de leur traitement.

« Ceux qui seront âgés de plus de quarante-cinq ans et qui auront, pendant vingt ans au moins, rempli des fonctions ecclésiastiques rémunérées par l'Etat, recevront une pension annuelle et viagère égale à la moitié de leur traitement.

« Les pensions allouées par les deux paragraphes précédents ne pourront pas dépasser 1,500 fr.

«  En cas de décès des titulaires, ces pensions seront réversibles, jusqu'à concurrence de la moitié de leur montant, au profit de la veuve et des orphelins mineurs laissés par le défunt et, jusqu'à concurrence du quart, au profit de la veuve sans enfants mineurs. A la majorité des orphelins, leur pension s'éteindra de plein droit.

« Les ministres des cultes actuellement salariés par l'Etat, qui ne seront pas dans les conditions ci-dessus, recevront pendant quatre ans à partir de la suppression du budget des cultes, une allocation égale à la totalité de leur traitement pour la première année, aux deux tiers pour la deuxième, à la moitié pour la troisième, au tiers pour la quatrième.

« Toutefois, dans les communes de moins de 1,000 habitants et pour les ministres des cultes qui continueront à y remplir leurs fonctions, la durée de chacune des quatre périodes ci-dessus indiquées sera doublée.

« Les départements et les communes pourront, sous les mêmes conditions que l'Etat, accorder aux ministres des cultes actuellement salariés par eux des pensions ou des allocations établies sur la même base et pour une égale durée.

« Réserve est faite des droits acquis en matière de pensions par application de la législation antérieure, ainsi que des secours accordés soit aux anciens ministres des différents cultes, soit à leur famille.

« Les pensions prévues aux deux premiers paragraphes du présent article ne pourront se cumuler avec toute autre pension ou out autre traitement alloué, à titre quelconque, par l'Etat, les départements ou les communes.

« La loi du 27 juin 1885, relative au personnel des facultés de théologie catholique supprimées, est applicable aux professeurs, chargés de cours, maîtres de conférences et étudiants des facultés de théologie protestante.

« Les pensions et allocations prévues ci-dessus seront incessibles et insaisissables dans les mêmes conditions que les pensions civiles. Elles cesseront de plein droit en cas de condamnation à une peine afflictive ou infamante ou en cas de condamnation pour l'un des délits prévus aux articles 34 et 35 de la présente loi.

« Le droit à l'obtention ou à la jouissance d'une pension ou allocation sera suspendu par les circonstances qui font perdre la qualité de Français, durant la privation de cette qualité.

« Les demandes de pension devront être, sous peine de forclusion, formées dans le délai d'un an après la promulgation de la présente loi.

« Art. 43, § 1er. — Un règlement d'administration publique, rendu dans les trois mois qui suivront la promulgation de la présente loi, déterminera les mesures propres à assurer son application » ;

Le Conseil d'Etat entendu,

Décrète :

Chapitre Ier
PENSIONS VIAGÈRES A LA CHARGE DE L'ÉTAT

Art. 1er.

Tout ministre d'un culte prétendant à une pension viagère en vertu de l'article 11 de la loi du 9 décembre 1905 adresse sa demande au préfet du département dans lequel il a rempli ses dernières fonctions ecclésiastiques rémunérées par l'Etat.

Cette demande indique les nom, prénoms et domicile de l'intéressé, ses services ecclésiastiques rétribués par l'Etat et le montant du dernier traitement correspondant.

En outre, si, lors de la promulgation de la loi, l'intéressé n'était plus pourvu de fonctions ecclésiastiques rémunérées par l'Etat, il doit faire connaître les fonctions rentrant dans l'organisation publique des cultes qu'il exerçait, à cette date, à titre de ministre du culte.

La demande porte la signature légalisée du ministre du culte ; elle est accompagnée d'une expédition de son acte de naissance.

Elle est inscrite à la date de sa réception sur un registre spécial et il en est donné récépissé daté et signé, avec indication des pièces jointes.

Art. 2.

Le préfet soumet la demande avec ses annexes à une commission dont les membres sont nommés par lui. Cette commission est composée du secrétaire général de la préfecture ou d'un membre du conseil de préfecture et de deux agents du ministère des finances. Le président est désigné par le préfet.

Celui-ci joint au dossier un projet de liquidation établi en prenant pour base le dernier traitement payé par l'Etat, à l'exclusion de tout supplément ou indemnité accessoire. Les services admissibles sont arrêtés soit à la date de la promulgation de la loi, soit à celle de la cessation des fonctions ecclésiastiques rémunérées par l'Etat, si ces services ont pris fin antérieurement à cette promulgation.

Dans le cas où le préfet estime que l'intéressé n'a pas droit à pension, il propose soit le rejet pur et simple de la demande, soit l'attribution d'une allocation temporaire.

La commission, après avoir vérifié les pièces produites, émet un avis tant sur la demande de pension que sur les propositions du préfet.

Le préfet adresse ensuite le dossier au ministre des cultes avec ses observations.

Art. 3.

Le ministre des cultes arrête la liquidation, en négligeant sur le résultat final du décompte les fractions de franc ; il la soumet au ministre des finances et prépare un décret de concession qui est contresigné par les deux ministres.

Le décret mentionne les noms, prénoms, qualité, date et lieu de naissance du pensionnaire, la nature et la durée de ses services ecclésiastiques rémunérés par l'Etat, la quotité du traitement qui a servi de base à la liquidation, le montant de la pension et le domicile de l'intéressé.

Art. 4.

Si le ministre des cultes rejette la demande de pension, il fait notifier sa décision en la forme administrative à l'intéressé, sous réserve du recours devant le Conseil d'Etat.

Si le ministre estime que l'intéressé n'a droit qu'à une allocation temporaire, il est procédé comme il est dit au chapitre II du présent décret.

Art. 5.

Dans le cas où un ministre du culte est titulaire d'une pension de l'Etat, d'un département ou d'une commune, il opte entre cette pension et celle à laquelle il peut avoir droit d'après l'article 11 susvisé.

La même faculté d'option est ouverte au titulaire d'une pension de la Caisse générale des retraités ecclésiastiques qui, lors de la promulgation de la loi, exerçait à titre de ministre du culte des fonctions rentrant dans l'organisation publique des cultes.

Le ministre du culte, qui, à cette date, remplissait des fonctions ecclésiastiques rémunérées concurremment par l'Etat et par un département ou une commune, peut cumuler les pensions, qui auront été liquidées à son profit d'après chacun des traitements qui lui étaient payés.

Art. 6.

Le ministre du culte, qui, postérieurement à la promulgation de la loi, continue à jouir à un titre quelconque d'un traitement de l'Etat, d'un département ou d'une commune, peut néanmoins obtenir la concession d'une pension en vertu de l'article 11 susvisé, sauf suspension du payement des arrérages à raison de la prohibition de cumul édictée par le paragraphe 9 dudit article.

Art. 7.

Si un ministre du culte remplissant les conditions prescrites par les paragraphes 1er et 2 de l'article 11 susvisé décède avant l'expiration du délai fixé par le dernier paragraphe dudit article sans avoir demandé la pension à laquelle il pouvait prétendre, la liquidation en est opérée au profit des ayants droit et la réversion effectuée en faveur de la veuve et des orphelins mineurs dans les conditions prévues par le quatrième paragraphe du même article.

Art. 8.

Pour que la réversion prévue par l'article 11 susvisé puisse avoir lieu, le mariage du titulaire de la pension doit avoir été célébré avant la promulgation de la loi.

Art. 9.

Lorsqu'un pensionnaire est décédé laissant une veuve et des enfants mineurs, la pension concédée par réversion jusqu'à concurrence de la moitié, se partage en deux parties égales, dont l'une est attribuée à la veuve et l'autre aux enfants mineurs. La fraction attribuée à ceux-ci est