Page:Jacob - Souvenirs d’un révolté.djvu/6

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— En v’là un !

Je me dirigeai avec lui à la porte et je projetai un éclair.

— Tombé ! S’écria Bour. Tiens ! Le v’là à terre, ajoutât-il en me montrant le scellé tout maculé de boue.

— Tant pis. Dépêchons-nous d’aller ailleurs, lui dis-je. Profitons de la pluie pour faire une prompte ouverture.

— Encore dix fois comme ça, soupira Pélissard, et pardessus et parapluie passeront à l’as. Pas de veine ! nom de Dieu !

La pluie, la boue, le froid le rendaient grincheux. Après bien des tours et des détours dus à l’inexpérience de Bour qui ne se reconnaissait qu’avec peine dans Abbeville dont il était le passager pour la première fois, ce ne fut qu’une heure après notre débarquement que nous finîmes notre tournée d’inspection. Sur onze scellés, dix étaient tombés. Un seul restait : le n°5 de la place Saint-Pierre.

— Qu’est-ce ? demandai-je à Bour.

— Rentière, répondit-il après avoir lu sur son calepin.

Je connaissais l’hôtel pour l’avoir vu habité à chacun de nos passages à Abbeville. Aussi, pour plus de sécurité, allai-je de nouveau examiner les scellés. Aucun doute n’était possible. Ils tenaient bel et bien. Aussi résolûmes-nous d’attaquer. Éclairé par l’expérience, d’un simple coup d’œil, je jugeai la porte intombable. Semblables à ces vieux portails d’églises garnis de fortes serrures, ornés de gros clous à têtes taillées en diamants, la porte n’offrait et ne pouvait offrir aucune prise. Je le fis remarquer à mes compagnons ; mais Pélissard ne fut pas de mon avis. Il essaya de faire une pesée ; ses efforts demeurèrent vains.

— Nous ferions mieux d’attaquer le soupirail de la cave, leur dis-je.

L’idée fut acceptée, et après quelques pesées la grille fut descellée. J’allai la porter immédiatement sous un portail en biais qui se trouve à quelques mètres des Nouvelles Galeries abbevilloises, en face le logement et les bureaux du percepteur, afin de la dérober aux regards des passants. Pendant cette courte absence, Bour avait essayé de s’introduire dans la cave, mais gêné par une barre de fer posée horizontalement dans l’encadrement du soupirail, il n’avait pu réussir. Devant cette impossibilité je n’insistai pas. Je cherchai une autre voie de pénétration. J’allai au milieu de la rue pour mieux examiner l’édifice. Après