Page:Jacobus X - L'amour aux Colonies, 1893.djvu/396

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Tahiti se répandent en plaintes amères sur le peu de moralité et la vénalité de la Vahiné de Papeete, Desfontaines s’est fait leur écho fidèle ; il reconnaît d’ailleurs que si ce tableau de l’immoralité des Tahitiennes, « peint par les Français, en résidence à Papeete, reproduit assez bien le caractère des Indigènes de la capitale, il est absolument faux pour ceux de l’Intérieur. »

Et de quoi donc se plaint la race Européenne ? Ne recueille-t-elle pas les fruits amers de ce qu’elle a semé ? Les récits de Cook et de Bougainville nous ont montré la race Tahitienne parvenue à un degré de civilisation très avancé, digne d’être mis en parallèle avec celui des anciens Grecs. La race Tahitienne était à ce moment à l’apogée de son développement physique et moral. Les Tahitiens étaient bons, doux, hospitaliers, au point d’offrir leurs femmes, non pour de l’argent, mais pour le plaisir de voir faire l’amour. Dans cette île fortunée, la Vahiné donnait ses charmes, pour le plaisir qu’elle en retirait, et jamais par esprit de lucre. N’est-ce pas l’Européen, avec sa prétendue civilisation supérieure, qui a bouleversé ces mœurs, un peu cyniques, je le reconnais, mais simples et naïves ? Il a donné au Tahitien des besoins factices en lui apportant l’alcool, et l’a empoisonné moralement avec son or, comme il lui a pourri le sang en lui transmettant la syphilis, absolument inconnue avant la découverte de l’île. C’est l’Européen qui a rendu la Vahiné ivrogne, intéressée et lascive pour de l’argent. Le Tané est devenu, par la force des choses, maquereau et souteneur. La Vahiné de Papeete est la digne émule de la prostituée de Paris et de Londres, et elle n’a que trop bien profité des leçons de l’Européen.

Toutes les turpitudes de la prostitution vénale se trouvent maintenant à Papeete, je l’ai constaté de visu. Les grand’mères des Vahinés actuelles étaient des ho-