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promulguer la nouvelle loi agraire. Elle abolit la grande propriété foncière, mais sans fonder en réalité l’exploitation collective. Les paysans se partagent l’usufruit des terres. Rosa Luxembourg a très justement observé qu’en pensant ainsi s’attacher les paysans, la révolution faisait un faux calcul, que ce morcellement du sol contrecarrait la tendance à la centralisation économique impliquée par le nouveau régime et « que la mesure, non seulement n’était pas socialiste, mais coupait le chemin qui mène au socialisme ». On ne créait pas une propriété socialiste, mais une propriété morcelée, dont la culture devait nécessairement marquer un recul technique sur celle des grands domaines. La répartition des terrains, fatalement arbitraire, ne ferait qu’accentuer l’inégalité ancienne, au profit des paysans riches, les koulaks. En fait, d’ailleurs, les décrets intervenus au sujet de la répartition ne firent que reconnaître un état de choses accompli, car les paysans, dès octobre, s’étaient réparti la terre de leur propre initiative.

La situation de plus en plus tragique de la Russie rendra bientôt illusoires ces partages. Tandis que l’armistice sépare les belligérants sur tous les fronts, la guerre civile ravage l’ancien empire.

De la fin de 1918 à l’automne 1919, les