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LE REFLUX ET LA DÉBÂCLE

che, il n’y a aucune inquiétude à avoir ; le prince Schwarzenberg arrive aujourd’hui ; les relations les plus intimes existent entre les deux cours. » Pourtant, un mois après York, Schwarzenberg a signé un armistice avec les Russes. L’Autriche est encore moins en guerre avec la Russie que la Russie, en 1809, n’était en guerre avec l’Autriche. Elle n’est plus l’alliée de la France. Elle est neutre, et quelle neutralité suspecte ! Quand elle prépare une médiation qui sera une « médiation armée ». Napoléon veut comprendre qu’elle se met à sa disposition, qu’elle offre ses bons offices pour lui procurer la paix avec Frédéric-Guillaume et Alexandre, une paix qui conserve l’essentiel, l’Empire. Il suffira d’une victoire, d’un Austerlitz, d’un Iéna, — car il en est toujours à s’imiter lui-même dans des situations toujours identiques — et l’entremise de l’Autriche finira tout… Si tout pouvait être fini par une nouvelle victoire et s’il restait à Napoléon les moyens d’obtenir autre chose que des succès d’un jour.

Ses illusions, elles sont pour une part volontaires. Qu’en 1813 il recommence 1805 et 1806, qu’il disperse la nouvelle coalition avant qu’elle ait réuni ses forces, sera-t-il plus avancé qu’en 1807 ? L’enjeu n’est‑il pas toujours le même ? Il le sait et il le dit : « L’Angleterre met pour condition à la paix le déchirement de cet Empire… L’ennemi eût-il son quartier général au faubourg Saint‑Antoine, le peuple français ne renoncera jamais à la réunion de la Belgique. » Il le répète à Schwarzenberg : « Les Anglais croient que la France est écrasée ; ils me demanderont la Belgique. » Et, pensant tout haut devant cet Autrichien : « Ma position est difficile. Si je faisais une paix déshonorante, je me perdrais. J’ai plus de ménagements à garder pour l’opinion parce que j’en ai besoin. » Il sait bien que la France exténuée soupire après la paix. S’il la faisait à tout prix, il n’entendrait d’abord que des cris d’allégresse, et puis, quand on aurait oublié les fatigues, les peines, les