Page:Jacques Boileau - De l abus des nudites de gorge, Duquesne, 1857.djvu/94

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LXIII. Il y a bien de la différence entre ce que le mari tolère et ce qu’il désire. Un mari qui a de l’honnesteté, de la douceur et de l’amour pour sa femme, souffre sans aucune inquiétude et sans se plaindre qu’elle découvre sa gorge : mais il ne s’ensuit pas qu’il le souhaitte et qu’il l’ordonne. Cependant si le mari ne témoigne point à sa femme qu’il veut qu’elle aille ainsi découverte, et s’il le souffre seulement, c’est à tort qu’elle allègue pour sa défense la volonté de son mari, puisqu’au lieu de se conformer par respect à ses désirs comme elle voudrait faire croire, c’est luy qui par bonté s’accommode à son humeur.

LXIV. En second lieu, si ce n’est que pour plaire à son mari, qu’elle découvre son sein, pourquoy le découvre-t-elle ailleurs que devant son mari. En troisième lieu, supposé même que son mari luy commandât d’aller en public la gorge découverte, elle devrait le faire par pure obéissance pour le faire innocemment, elle devroit le faire avec quelque répugnance secrète, connoissant le danger où elle s’expose et où elle expose ceux qui la regarderont. Que si au contraire elle le fait avec joie et avec plaisir, c’est une marque évidente qu’elle songe moins à obéir à la volonté de son mari, qu’à satisfaire la passion qu’elle a de paroître belle